Apocalypse, no

De l’avis de la plupart des spécialistes, la campagne présidentielle aux États-Unis est parmi les plus triviales de tous les temps, si ce n’est la pire ayant jamais existé. Les attaques personnelles et le dénigrement systématique de l’adversaire sont devenus la règle et ont atteint ici des sommets, qu’ils soient fondés ou non sur des éléments objectifs. Les outrances systématiques du candidat républicain, qui auraient dû en toute logique le disqualifier définitivement dès le début de la campagne et même lui interdire l’accès à l’investiture de son parti, ne semblent pas le desservir aux yeux de l’opinion.

Pire encore, de récents sondages le donnent au coude à coude avec la candidate démocrate et même légèrement en avance pour l’un d’entre eux. Ce qui permet aux journaux américains et étrangers d’agiter le spectre d’une élection surprise de Donald Trump. On dirait bien qu’au lendemain d’Halloween les Américains jouent à se donner des frayeurs, une sorte de mauvais remake de « shérif, fais-moi peur », le feuilleton des années 80, dans lequel la voiture des trafiquants finissait toujours à la casse après des cascades spectaculaires. Le problème, c’est que ce n’est pas seulement le sort des États-Unis qui se joue dans une élection à qui perd gagne, mais peut-être celui de la planète. Même si l’on fait la part de propagande dans l’argument d’Hillary Clinton concernant le manque de sang-froid de son adversaire, l’idée de confier les codes nucléaires à un irresponsable sanguin et colérique, susceptible de prendre la mouche pour la moindre remarque et voulant démontrer sa puissance virile, peut donner quelques frissons dans le dos, spécialement en face d’un Wladimir Poutine qui a exactement le même positionnement, dans le registre glacial.

Si Donald Trump n’est pas d’ores et déjà complètement laminé par ses propres déclarations, c’est que la candidate démocrate ne rallie pas les suffrages des hésitants, comme avait su le faire Obama lors de son premier mandat. Les deux adversaires réussissent le tour de force d’être rejetés par 60 % de la population et Hillary Clinton ne l’emporterait que par défaut, sans soulever l’espérance qu’avait réussi à mobiliser l’éventualité d’un premier président noir, alors qu’elle peut devenir la première femme présidente de son pays et qu’elle va très probablement y parvenir. Malgré les soubresauts de la campagne et l’affaire des emails qui ressort en dernière minute alors qu’elle semblait définitivement réglée, Hillary Clinton conserve une avance confortable dans les états qui font la décision, tandis que son adversaire devrait faire basculer l’électorat dans tous ces « swinging states » pour conserver une chance de l’emporter. L’Amérique et le monde devraient donc échapper au pire, pour cette fois.