Un vide sidérant

Je dois commencer par vous faire un aveu : je n’ai pas regardé en direct la grand-messe de 13 heures sur TF1 et France 2, et le sermon différé du président, promis depuis des mois, qui devait dresser le bilan de l’action politique depuis l’adoption aux forceps de la réforme des retraites. Je me suis épargné ce pensum parce que ce président ne sait pas faire court, même quand il n’a rien à dire, et que ses discours creux finissent par me donner des boutons. Je pensais aussi avoir une session de rattrapage dans les journaux télévisés du soir et sur les chaînes d’information continue.

Et je n’ai pas été déçu, car le principal sujet à avoir retenu l’attention des commentateurs politiques professionnels, dont je ne suis pas, concerne sa réaction embarrassée aux déclarations de Frédéric Veaux, le directeur de la Police nationale, qui soutient sans condition tous les policiers, y compris s’ils commettent des erreurs ou même des fautes. Emmanuel Macron, qui n’a pourtant que l’ordre et la répression à la bouche, s’est contenté de rappeler que nul n’était au-dessus de la loi, sans envisager une seconde de sanctionner ce haut-fonctionnaire pour ses propos séditieux, qui sapent le fonctionnement de la justice, et même, au bout du compte, celui de la police, qui doit être au service de la population. Il est vrai que le patron de la police a reçu le soutien de son collègue et ancien ministre Laurent Nunez, préfet de police de Paris, et les discrets encouragements de Gérald Darmanin, actuel ministre de l’Intérieur, déçu, parait-il, de ne pas avoir succédé à Élisabeth Borne dernièrement.

Car si le vide de cette fin de règne me parait sidérant du point de vue des actions concrètes, c’est le trop-plein du côté des ambitions personnelles. Les candidats aux fonctions les plus élevées de l’état sont légion, y compris dans le camp des partisans du président actuel. La résistible ascension d’Emmanuel Macron a démontré que le culot, soutenu par les forces de l’argent, pouvait payer. S’il y est parvenu, pourquoi pas moi ? semble le crédo de tout homme politique actuellement. D’autant plus que le président ne peut pas se représenter, mais qu’il se verrait bien en faiseur de roi. Il n’écarte pas l’idée de soutenir Édouard Philippe en 2027, mais d’autres noms circulent comme celui de Bruno Le Maire, ou même Jean Castex, déjà improbable comme Premier ministre. L’échéance électorale est encore loin, et beaucoup de choses peuvent se passer d’ici là, mais l’étiquette macroniste pourrait se révéler bien encombrante et constituer plus un handicap qu’un tremplin. Le principal intéressé lui-même déclarait en juin qu’il souhaitait faire, plutôt que durer, une façon de reconnaître la vacuité de son corpus idéologique, un pragmatisme au service des intérêts économiques.