Récidive
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 27 juin 2023 10:32
- Écrit par Claude Séné
C’est plus fort que lui, il ne peut pas s’en empêcher. Emmanuel Macron a beau savoir que ce genre de déclaration est contre-productif, qu’un président « ne devrait pas dire ça », il a encore lâché à Marseille une petite phrase à propos du chômage, en réponse à une mère désespérée qui s’inquiète de la situation de son fils qui a du mal à trouver du travail. En 2018, c’est le président lui-même qui rappelle sa provocation, il suffisait, selon lui, de traverser la rue, cette fois, il fanfaronne à nouveau sur sa capacité à dénicher 10 offres d’emploi rien qu’en faisant le tour du vieux port.
Si le président récidive, démontrant qu’il n’a toujours rien compris aux préoccupations légitimes des vrais gens, qui sont confrontés aux vrais problèmes, tels que la précarité de l’emploi, quand on en trouve, ou la hausse vertigineuse des prix des denrées de première nécessité, alors je me sens autorisé à lui redire en quoi son raisonnement est biaisé par une idéologie sous-jacente dont il ne semble même plus avoir conscience. La première insulte au peuple de ceux « qui ne sont rien », comme il dit, c’est de sous-entendre que ceux qui ne travaillent pas sont des fainéants, des chômeurs volontaires, qu’il convient de débusquer. C’est pourquoi il faudrait obliger les bénéficiaires du RSA à fournir un travail en contrepartie de leur allocation, pour les déloger de ce confort supposé, et rendre leur situation plus difficile encore. Il ne semble pas lui venir à l’esprit que la véritable incitation au travail, c’est d’offrir une rémunération décente et des conditions de travail correctes. Il s’en remet au bon vouloir du patronat, avec les conséquences que l’on voit.
Venons-en au cœur du sujet. S’il existe certaines offres non pourvues, elles ne suffiraient pas numériquement, et de loin, à fournir un travail à tous ceux qui n’en ont pas. On ne peut pas non plus exiger d’un demandeur d’emploi qu’il s’expatrie ou qu’il se coupe de toutes ses racines pour aller travailler à l’autre bout de la France. Pas plus qu’il ne sacrifie sa carrière et ne baisse drastiquement ses demandes de rémunération pour prendre n’importe quel travail. Et c’est pourtant ce qui est sous-entendu dans ce discours. Le marché du travail idéal selon ce raisonnement serait d’avoir une profusion de candidats, et que le meilleur gagne. Pour un débrouillard qui va mettre son pied dans la porte et obtenir son bâton de maréchal, combien de recalés, de malchanceux, de victimes des accidents de la vie, condamnés à tirer le diable par la queue, à galérer, à zoner, voire à tomber dans la délinquance ? Emmanuel Macron, consciemment ou non, a érigé en exemple sa propre réussite sociale. Il a d’ailleurs inspiré un bon nombre de candidats qui espèrent lui succéder, sans avoir le profil du poste. Ça ne fait pas une politique.