Il n’y a que les imbéciles…

Je n’ai pas besoin de compléter cette phrase pour que chacun ait la confirmation que notre pays est dirigé par un homme certainement très intelligent, car il lui arrive assez régulièrement de changer d’avis sans se donner la peine de nous expliquer le pourquoi du comment de ces revirements. Car la beauté de la chose, c’est que le président conserve son infaillibilité, quel que soit son avis du moment, même s’il entre en contradiction avec son avis précédent. Pour le meilleur, comme pour le pire d’ailleurs. Pour une fois, le changement va dans le bon sens.

Emmanuel Macron participait au Forum de sécurité régional Globsec à Bratislava, en Moldavie, un pays menacé lui aussi par les visées expansionnistes de Vladimir Poutine et, plus que ce qu’il a dit, c’est ce qu’il n’a pas dit qui est nouveau et intéressant. En effet, le président a rappelé que la paix dans les Balkans passerait par « des garanties de sécurité tangibles et crédibles à l’Ukraine ». Jusque-là, rien de neuf. Mais lors de ses précédentes déclarations, Emmanuel Macron reconnaissait à la Russie les mêmes garanties, alors que c’est elle qui a agressé et envahi sa voisine ukrainienne, et non l’inverse. Une façon de légitimer le droit du plus fort en renvoyant dos à dos les adversaires. Mr Macron, s’il daignait expliciter sa nouvelle position, dirait probablement que le vent a tourné, selon la célèbre citation d’Edgar Faure que l’on qualifiait volontiers de girouette. Et c’est un fait que l’issue militaire du conflit n’est plus aussi prédictible qu’au moment de l’invasion. L’armée russe a laissé passer sa chance d’une victoire éclair, et ne peut espérer de succès sur le terrain qu’au prix d’une mobilisation générale, inacceptable politiquement. Emmanuel Macron se contente donc de voler au secours de la victoire annoncée, mais c’est un progrès.

On ne peut donc que regretter son obstination coupable à mettre en œuvre une réforme des retraites arrachée aux forceps, qu’il est réduit à défendre bec et ongles par l’intermédiaire d’une majorité introuvable en utilisant des artifices indignes d’un chef d’État. Tout ça pour gagner un peu de temps avec un dispositif qui sera obsolète avant même d’être appliqué, et alors qu’il a renoncé, sans explications, à sa retraite par points, négociée avec la CFDT et abandonnée en rase campagne, sans autre forme de procès, pendant la pandémie du Covid 19. On a vraiment l’impression d’une politique opportuniste, au sens des maladies qui profitent d’une faiblesse des défenses immunitaires pour attaquer l’organisme social. Au fond, ce qui intéresse Emmanuel Macron, c’est de faire des coups, pour démontrer encore et encore que le patron, c’est lui. Qu’avait-il besoin d’aller humilier sa propre Première ministre, qui ne risque pourtant pas de lui faire de l’ombre tant elle est transparente, en lui administrant un cours d’histoire et de géopolitique sur la figure du Maréchal Pétain ?