Un splendide isolement

On savait déjà qu’Emmanuel Macron se fichait du tiers comme du quart de l’opinion de ses concitoyens, lui seul étant capable de comprendre pleinement la situation économique, politique, sociale et financière du pays. Il en a fait la démonstration avec son mépris pour les millions de salariés qui ont persisté à ne pas accepter sa réforme des retraites et qui continuent à la rejeter pour peu qu’on leur pose la question. On a confirmation aujourd’hui qu’il fait également fi des recommandations des experts, tant qu’elles ne vont pas dans le sens qu’il a préalablement défini.

Même Jean Pisani-Ferry, artisan du programme économique du candidat Macron en 2017, va probablement voir son plan sur le financement de la transition écologique se fracasser contre le mur de la tour d’ivoire présidentielle au nom du dogme d’infaillibilité de l’ultra président, autoproclamé meilleur économiste de France comme Raymond Barre en son temps. Il pourrait subir le même sort que le rapport Borloo écarté d’un revers de main pour finir sa course dans les corbeilles à papier de l’Élysée, version moderne des oubliettes de l’histoire. Le principal défaut du projet de Pisani-Ferry, c’est de contredire des axiomes fondateurs du projet présidentiel. Il propose en effet de financer la transition écologique par le recours à un impôt, certes provisoire et exceptionnel, mais contraire à la volonté affichée d’Emmanuel Macron de ne pas augmenter les prélèvements, officiellement pour favoriser les classes moyennes, mais surtout de ne pas taxer les plus riches, précisément les 10 % visés par le rapport, ce qui équivaudrait presque au rétablissement de l’Impôt sur la fortune, honni des soutiens du président, qui l’ont porté au pouvoir pour défendre leurs intérêts.

Pour les besoins de sa cause, le président va donc prôner l’autofinancement de la transition écologique, dont les bénéfices sont supposés couvrir les investissements nécessaires que l’on a tant traîné à mettre en place. C’est sans doute vrai à terme, mais un poil optimiste dans un futur immédiat. Qu’à cela ne tienne, Macron va nous inventer un concept : la réindustrialisation de la France, grâce à des capitaux étrangers dont nous serons ensuite tributaires, et une pause écologique pour freiner les exigences européennes et avoir une chance d’atteindre des objectifs revus à la baisse. Même le ministre de l’Écologie (si, si, il existe) admet sans moufter qu’au moment où l’on fait semblant de croire à la possibilité de limiter le réchauffement climatique à un degré cinq, les projections et les études tablent plutôt sur 3 ou 4 degrés d’augmentation en France. Mais le président n’en a cure, pas plus que du risque évoqué par Jean Pisani-Ferry d’une révolte du type Gilets jaunes si les efforts demandés aux Français ne semblent pas équitablement répartis. Même une jacquerie ne lui fait pas peur : l’air est tellement plus pur, là-haut.

Commentaires  

#1 jacotte86 24-05-2023 19:50
quel talent.. toi pas jupiter! merci de m'avoir fait rire ...
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