Relativité restreinte

Rassurez-vous, je ne vais pas m’engager dans un sujet qui me dépasse largement et dont je laisse aux spécialistes le soin de le vulgariser. Il vous a peut-être échappé que les résultats de l’enquête PIRLS avaient été publiés il y a peu, hier précisément. PIRLS, quèsaco ? Comme souvent, il s’agit d’un acronyme en langue anglaise, voire en globish, qui signifie « Progress in International Reading Literacy Study », une étude menée tous les 5 ans pour évaluer le niveau en lecture et en compréhension de l’écrit d’enfants de CM1 dans 57 pays participants.

La dernière mouture disponible concerne l’année 2021 et la période de référence, 2016 à 2021, comprend les années de restrictions scolaires dues à la pandémie de Covid. On se souvient des cocoricos du ministre Blanquer s’enorgueillissant d’avoir laissé les écoles françaises ouvertes le plus possible, malgré les risques d’aggravation de l’épidémie et de la transmission du virus. Les écoliers français ont-ils moins pâti que leurs homologues de pays ayant davantage fermé les établissements scolaires ? Il sera bien difficile d’en juger. Certes, la France a cessé de voir ses résultats baisser, mais elle reste tout juste dans la moyenne européenne des pays participants, et à peine au-dessus de la moyenne internationale. Pas de quoi pavoiser donc ni d’y voir un effet dû à la politique gouvernementale française depuis 15 ans. On observe en réalité une grande stabilité dans les résultats observés, et les spécialistes estiment que ce sont les facteurs nombre d’élèves par classe, environnement socioculturel, ou formation des maîtres qui expliquent les résultats des « premiers de la classe » : Singapour, Hongkong et Finlande.

Selon un chercheur français, nous nous focalisons trop sur les techniques de déchiffrage ou d’encodage, et insuffisamment sur la compréhension. La formation de base est trop courte et devrait être complétée tout au long de la carrière des enseignants. J’y ajouterai l’idée que l’existence même d’un tel classement international est un aspect du problème et non un pas vers sa résolution. Nous ne sommes pas les seuls, mais en France on adore faire des classements sur tout et n’importe quoi : le meilleur hôpital, la meilleure école, la meilleure université, la plus grande fortune, le meilleur saucisson, que sais-je ? C’est-à-dire qu’on organise et qu’on institutionnalise la compétition sans nécessairement de profit pour l’ensemble. Les apprentissages scolaires n’échappent pas à cette tendance générale. Au lieu d’organiser des coopérations entre élèves, trop souvent l’individualisme et la rivalité prennent le dessus au nom d’une soi-disant « saine » émulation. Le calcul même des performances scolaires, réduites à une simple moyenne peut cacher des disparités interindividuelles importantes. Pour permettre une amélioration globale du niveau de compréhension des textes, puisque c’est lui qui pêche le plus, il serait temps de commencer par le commencement : une formation initiale des enseignants axée sur cet aspect et renforcée tout au long de la carrière, accompagnée d’une rémunération digne de la mission demandée.