Je fais un rêve
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 21 mars 2023 10:44
- Écrit par Claude Séné
Après le rejet d’extrême justesse de la motion de censure contre le gouvernement, beaucoup des derniers partisans du président de la République le pressaient de prendre la parole. Ce sera chose faite demain, sous une forme qui ne fait pas l’unanimité, y compris dans son simple énoncé. Pour TF1, le président répond ainsi à une invitation des JT de 13 heures de la chaîne et de France 2, tandis que pour Ouest France, c’est le président qui donnera une interview diffusée sur les deux chaînes. Quant à Libération, il préfère la formulation : « Emmanuel Macron s’adressera aux Français » et Centre Presse Aveyron, qu’il prendra la parole.
D’une manière ou d’une autre, ces titres indiquent bien que le premier et à vrai dire le seul responsable de la situation politique actuelle, qui se traduit par un rejet massif de l’exécutif, c’est le président de la République lui-même. La pratique de la Constitution est le reflet d’un dévoiement des intentions du législateur qui a rédigé le texte fondateur en 1958. Le Général de Gaulle avait voulu un pouvoir personnel fort pour arbitrer les conflits potentiels en dernier ressort, mais il ne soulevait pas le capot pour se mettre les mains dans le cambouis et réparer le moteur lui-même. Il pouvait ainsi sacrifier un ou plusieurs pions, sans que sa légitimité en soit affectée. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, où le Président cumule ses fonctions avec celles d’un super Premier ministre. Par conséquent, l’échec de la réforme des retraites, rejetée massivement par l’opinion et une grande partie des députés, malgré des artifices pour maquiller la réalité, est imputable au Président, et la démission forcée du gouvernement n’aurait pas résolu ce problème.
La seule attitude digne et responsable serait, et ce n’est pas trop tard de prendre acte de la volonté populaire et d’en assumer la responsabilité en reprenant la formule de Lionel Jospin au soir de sa défaite du 21 avril 2002, qui avait annoncé son retrait de la vie politique à l’issue de l’élection présidentielle. La Constitution de 1958 ne l’y obligeait pas, mais le président de Gaulle tenait à faire légitimer son action par le peuple en soumettant les questions les plus importantes à référendum, en annonçant clairement qu’il démissionnerait si le scrutin lui était défavorable. C’est d’ailleurs ce qu’il a fait en 1969 quand le non l’a emporté au référendum sur les institutions et la décentralisation. Une attitude qui contraste avec celle de Chirac en 2005 qui s’est maintenu malgré le désaveu populaire sur le traité européen. Emmanuel Macron a encore la possibilité d’organiser un référendum sur la question des retraites, en sachant pertinemment qu’il le perdrait, sans attendre d’y être conduit par la procédure du référendum d’initiative partagée. Ce serait une manière élégante de mettre fin à un mandat qui ne l’a pas été, et de servir, enfin, à quelque chose. Je sais, je fais un rêve.
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