Le roi est mort, vive le roi ?

Rarement un joueur de football, ou un sportif en général, voire un être humain, aura suscité une telle unanimité. Edson Arantes do Nascimento, dit Pelé, qui s’est éteint jeudi dernier, est considéré comme le roi incontesté de ce jeu. Non pas seulement de son époque, comme après lui des joueurs extrêmement brillants, tels que Zinedine Zidane ou Michel Platini côté Français, mais le meilleur de tous les temps. Son palmarès est incroyable et ne sera probablement jamais égalé, avec ses trois titres de champion du monde et son millier de buts marqués en compétition.

Pelé se fera connaître dès l’âge de 17 ans en disputant sa première coupe du monde avec le Brésil en Suède en 1958. Cette année-là, la France possède une bonne équipe, emmenée par Raymond Kopa, fin tacticien qui distille les bons ballons dont profite Just Fontaine qui deviendra le meilleur buteur de la compétition avec 13 réalisations, record à battre. Moi, j’ai alors 14 ans, je tape dans le ballon comme tous les gamins, mais j’ai renoncé à sortir du lot, si tant est que j’aie pu y prétendre, avec un père et un oncle, certes amateurs, mais d’assez bon niveau. Je me contente de suivre à la radio le compte-rendu des matches, nous n’avons évidemment pas la télévision. Et voilà que la France accède à la demi-finale et affronte le grand Brésil. L’équipe de France fait d’abord jeu égal, et illusion, en première mi-temps, n’étant menée que 2 buts à un. Mais je déchante en entendant le commentateur égrener les noms brésiliens de plus en plus vite : Didi, Vava et surtout Pelé, qui marquera 3 buts, mettant ainsi fin au suspense. Nous finissons à la 3e place en remportant la « petite finale » contre l’Allemagne de l’Ouest.

Les exploits du roi Pelé ont naturellement suscité des vocations, que ce soit en Amérique du Sud, avec Diego Maradona, ou plus récemment Lionel Messi, et en Europe avec Cristiano Ronaldo, mais celui dont le parcours était le plus prometteur, est évidemment Kilian M’Bappé, que le souverain incontesté a plus ou moins adoubé en le présentant comme un éventuel successeur. C’est peut-être à cause de cette ambition mal dissimulée que le natif de Bondy a tant de mal à digérer la finale perdue contre l’Argentine. Un 2e titre de champion du monde après celui de 2018, lui aurait ouvert la voie royale vers une égalisation du record de Pelé, un rêve qui s’éloigne, même si les journalistes français le considèrent pour la plupart comme le meilleur joueur du monde actuellement. Il lui faudra une équipe à la hauteur de ses ambitions et de son talent personnel, comme au temps où le Brésil dominait le football mondial. Au foot comme ailleurs, un roi n’est rien sans le soutien de ses sujets.