Pas vu pas pris
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 13 mai 2022 10:32
- Écrit par Claude Séné
Je me demande comment l’ambassadeur de Russie en France va s’y prendre pour rejeter le témoignage irréfutable des caméras de surveillance qui ont filmé des soldats russes au début de l’invasion en Ukraine, tirer dans le dos de deux civils désarmés dans une concession automobile. Les images, insoutenables, ont été diffusées hier sur la chaîne américaine CNN, ce qui suffira, je suppose, à Alexeï Mechkov ou son porte-parole Alexander Makogonov, pour disqualifier un reportage pourtant éloquent en le faisant passer pour de la propagande occidentale, habilement déguisée en documentaire. Toute la stratégie russe dans la bataille de l’information a consisté à nier l’évidence et à accuser les Ukrainiens et ceux qui les soutiennent de mettre en scène de fausses preuves.
Lorsque les premières images des exactions commises par l’armée russe dans la ville de Boutcha, près de la capitale ukrainienne, ont été diffusées, les propagandistes du Kremlin ont tenté de faire croire que les corps sans vie qui jonchaient les rues étaient en réalité des acteurs jouant un rôle, en produisant des documents maquillés pour faire croire qu’ils n’étaient pas à l’origine de ces massacres. Ce sera plus difficile cette fois de contrer les enregistrements automatiques des caméras de surveillance, dont les autorités indépendantes telles que le Tribunal pénal international de La Haye pourront se saisir et vérifier qu’elles n’ont pas été trafiquées. On voit distinctement sur les enregistrements que les soldats russes sont identifiables, qu’ils sont revenus après un contrôle brutal pour abattre de sang-froid et dans le dos le directeur et le gardien de la succursale, le premier mourant sur le coup et l’autre après avoir eu le temps d’appeler du secours, qui arrivera trop tard.
Les Ukrainiens sont en train de recueillir un maximum de témoignages et de preuves contre l’armée russe, qui ne respecte pas le droit de la guerre en commettant des crimes : assassinats, vols, pillages, viols, trop nombreux pour être considérés comme des dérapages isolés. Les soldats qui ont été recrutés pour mener cette guerre ne sont pas formés pour beaucoup d’entre eux, ils ne sont pas suffisamment encadrés, et le haut commandement est lui-même défaillant. Il faudra déterminer après la fin des combats si les exactions commises ont été tolérées, encouragées ou ordonnées dans le but de terroriser la population. Et dans quelle mesure le chef suprême des armées, Vladimir Poutine était informé de ces atteintes intolérables aux règles de la guerre, ou en était l’instigateur. Dans tous les cas, il en est évidemment responsable. Le temps viendra, inévitablement, où il devra rendre des comptes. À ses victimes directes, en premier lieu, à l’opinion internationale ensuite, et enfin au peuple russe qu’il maintient dans l’ignorance de ces crimes inimaginables, en pratiquant le « ni vu, ni connu ».