La loi de Godwin
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 26 mai 2021 11:17
- Écrit par Claude Séné
Mike Godwin est un avocat américain connu pour avoir inventé et popularisé une « loi » purement empirique selon laquelle, plus une discussion sur Internet ou les réseaux sociaux dure, plus il est probable qu’un des interlocuteurs évoque la similitude avec l’idéologie nazie ou la personne d’Adolf Hitler, dans le but de discréditer son adversaire. Ce moment particulier est aussi parfois dénommé « Point Godwin », et il vient d’être atteint à propos de la vaccination contre le Covid-19 et du passe sanitaire envisagé par le gouvernement.
Au cours d’une manifestation confidentielle organisée par l’association « ami entends-tu » en référence au chant des partisans, se réclamant implicitement à une forme de résistance à un ennemi assez peu identifié, les journalistes présents se sont fait traiter de « collabos » et ils ont été conspués et menacés de mort. Une attitude virulente pour de soi-disant victimes de discriminations qui seraient obligées de porter l’étoile jaune du judaïsme, promises à l’extermination parce qu’elles ne suivraient pas la propagande majoritaire en refusant tout à la fois : le masque, les tests PCR, la vaccination, les gestes barrière et j’en oublie peut-être. Ce mouvement a trouvé sa caution scientifique en la personne d’Alexandra Henrion-Caude, généticienne, ancienne collaboratrice et chercheur à l’INSERM, qui tente de donner une justification à des théories du complot auxquelles elle semble adhérer sincèrement malgré une absence de preuves que sa formation scientifique devrait lui imposer.
Des précautions parfaitement superflues pour l’ancien humoriste Jean-Marie Bigard, qui ne fait plus rire du tout, et qui s’est assigné pour tâche d’être le porte-voix de ce combat douteux. Interviewé pendant la manif, il s’est mis à vociférer, du latin « vox », la voix, et « fere », porter, criant très fort un contenu anodin au sujet d’un désavantage subi par les personnes non vaccinées. Comme si quelqu’un se mettait à hurler l’annuaire du téléphone pour montrer sa colère et sa détermination. On peut s’interroger sur les raisons de cette hystérisation d’une opposition systématique à la lutte contre la pandémie, dont par ailleurs ils minorent le danger, à la manière d’un Donald Trump ou d’un Jaïr Bolsonaro, voire d’un Boris Johnson. Peut-être parce qu’ils sentent la partie perdue. L’opinion publique française que l’on pensait être la plus méfiante au monde vis-à-vis de la vaccination me parait être à présent majoritairement acquise à cette stratégie d’immunisation collective, même si quelques personnalités comme Anny Duperey restent réservées à titre personnel tout en acceptant le libre choix de chacun. Il subsistera sûrement une portion incompressible de la population qui ne voudra pas ou ne pourra pas se faire vacciner, mais les premiers effets sont encourageants et l’arrivée promise d’une réouverture à une vie sociale, associée au retour prévu de temps plus clément, incite à une dynamique plus positive. Les doses sont là, le personnel est mobilisé, on peut espérer rattraper le temps perdu.