On l’a échappé belle
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 12 mars 2021 10:56
- Écrit par Claude Séné
Qui donc ? Mais, moi, nous, vous qui lisez ces lignes. Figurez-vous que ce blog est hébergé par les soins d’une entreprise française qui vient de faire l’actualité avec le vaste incendie qui a détruit une partie de ses locaux à Strasbourg, et notamment les immenses entrepôts qui abritent les données de millions de sites web, dont celui de votre humble serviteur. Il m’est déjà arrivé d’avoir les pires difficultés à joindre le serveur qui héberge le site du Diabloguiste, en raison d’opérations de maintenance et c’est une situation assez désagréable, mais qui, heureusement, ne dure pas plus de quelques heures en général.
Plus ennuyeux évidemment lorsque le public ne peut plus accéder au site, par exemple celui du gouvernement, obligé d’afficher faute de mieux un message d’excuse tel que celui-ci : « Notre site est actuellement injoignable suite à un grave incident chez notre hébergeur. Nos équipes sont mobilisées pour rétablir le service au plus vite. » Encore plus gênant, voire catastrophique financièrement pour les entreprises pratiquant la vente en ligne, qui subissent le manque à gagner direct des commandes non passées, et la désorganisation de leurs services. Toute cette agitation vient nous rappeler fort opportunément que ce qu’on nous a vendu comme un progrès magnifique, la dématérialisation des données, stockées dans un nuage éthéré, le « cloud », comme il fallait l’appeler pour suivre la mode du globish, n’était en réalité que du vent, du pipeau. Le cloud n’existe pas, ou du moins, il se trouve bel et bien matérialisé quelque part et prend la forme de bâtiments contenant des machines, qu’il faut alimenter, protéger de la surchauffe, entretenir et mettre à l’abri des évènements extérieurs. Tout ceci ayant d’ailleurs un coût, ce qui explique que l’on a pu dire qu’un excès de mails, stockés sur des serveurs spécialisés, représente un gaspillage réel bien que caché de ressources qui seraient plus utiles ailleurs.
Les machines seront remplacées, mais les données qu’elles abritaient sont perdues, parties en fumée, à moins que leurs propriétaires n’aient pris la précaution d’en conserver un double, stocké à un autre emplacement géographique, ce qui représente une dépense supplémentaire. En effet, OVH propose bien un service de sauvegarde mutuelle des serveurs pour protéger les données des pannes et défaillances matérielles, mais un incendie ou un phénomène naturel peut réduire ces précautions à néant. Ce grave incident aura du moins eu le mérite de faire prendre conscience de la fragilité de systèmes de plus en plus sophistiqués et du fait que nous ne sommes pas à l’abri de reproduire des catastrophes mémorielles comparables à la destruction de la fameuse bibliothèque d’Alexandrie, réputée le réceptacle de toutes les connaissances à un moment donné, et dont l’incendie a symbolisé le mythe d’une civilisation perdue.