Pluralisme à la sauce info
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 4 décembre 2020 10:35
- Écrit par Claude Séné
Pour rester informé et alimenter mes chroniques journalières, j’ai pris l’habitude de faire un petit tour d’horizon vespéral des chaînes toute info de la télévision, après un programme cinématographique plus ou moins alléchant. C’est ainsi que j’ai appris, presque en temps réel, le décès de Valéry Giscard d’Estaing. Dans un cas tel que celui-là, ce n’est pas compliqué. Cnews, LCI, BFMTV, France info, LCP, France 24, Euronews, que sais-je, se mettent tous en mode monomaniaque et diffusent images d’archives et interviews de personnalités encore joignables à une heure tardive, au hasard, l’inoxydable Jack Lang.
Quand l’actualité n’impose pas un sujet aussi incontournable, chaque chaîne choisit son thème et les émissions qui en découlent se ressemblent cependant énormément. Il s’agit de réunir sur un plateau des personnalités politiques ou journalistiques supposées refléter la diversité et la pluralité des opinions sur un thème donné. La pièce centrale du dispositif est un présentateur, maitre de cérémonie, qui distribue la parole en essayant de permettre l’expression de tous les participants. Au temps jadis, les journalistes chargés de cette fonction s’efforçaient de respecter une sorte de neutralité en s’abstenant de donner leur avis personnel, et même en se faisant parfois l’avocat du diable et en plaidant contre leur propre opinion. Ce temps est définitivement révolu, et nous comprenons parfaitement les aprioris voire les préjugés des présentateurs, qui ne sont jamais de dangereux agitateurs, ni même des progressistes, quand ils ne sont pas clairement réactionnaires comme Pascal Praud, par exemple. Ensuite viennent les invités politiques, qui sont là es qualité et représentent leurs partis respectifs. Selon la recette du pâté d’alouettes, un cheval, une alouette, il arrive parfois qu’un point de vue divergent se glisse dans la conversation, de même que parmi les éditorialistes conviés à donner leur point de vue, quelques rares voix discordantes émergent du concert libéral dominant. C’est particulièrement vrai sur les sujets économiques, et souvent aussi sur les questions de société.
Mais le plus beau, c’est le rôle dévolu aux « experts » de tout poil qui sont supposés apporter la caution morale d’une opinion indépendante, basée sur des faits scientifiques incontestables, sans le moindre biais partisan. Dans cette catégorie, et ce ne sont pas les pires, on peut ranger les sondeurs, à condition d’oublier que ce ne sont pas eux qui payent et qui décident donc des questions à poser. On y trouve également des « politologues » qui tentent de dissimuler leurs préférences partisanes, généralement proches du pouvoir établi, quel qu’il soit. Tant et si bien que le malheureux téléspectateur qui, comme moi, aimerait entendre de temps en temps une critique fondée des décisions gouvernementales en est réduit à admettre que les constats établis par le rassemblement national sont souvent pertinents, même si leurs propositions sont haïssables et dangereuses. Et je crains que des esprits faibles s’y laissent prendre.