Refus d’obstacle

Je ne m’y connais pas spécialement en chevaux et mon expérience en la matière n’a pas toujours été glorieuse. Je sais quand même que dans les concours hippiques, il arrive que ce soit le cheval qui refuse de coopérer avec son cavalier et de sauter par-dessus les barres qu’il franchit habituellement sans broncher. On dit alors qu’il est ombrageux, qu’il a tout simplement peur de son ombre. J’avais donc l’intention de faire l’impasse sur la cérémonie des Césars, une remise de prix que je ne regarde pas à la télévision, pas plus que celle du Festival de Cannes, car trop longue et réputée ennuyeuse.

Ce qui m’a décidé à aborder le sujet, c’est la réaction pour le moins curieuse du président du groupe les Républicains à l’Assemblée nationale, Damien Abad. Interrogé sur l’attribution de la statuette de la meilleure réalisation à Roman Polanski pour le film « j’accuse », il botte en touche en déclarant « qu’on aurait pu éviter cette polémique… et que Monsieur Polanski n’aie pas le César, tout simplement. » C’est ce que j’appellerai avoir le courage de ses opinions et se mettre résolument du côté de ceux qui protestent le plus fort. Car il est bien possible que les féministes aient raison d’accuser Roman Polanski d’actes de viol, mais ce n’est pas le travail de l’Académie des Césars de rendre un jugement sur la personnalité des professionnels nommés dans les diverses catégories. Ce sont d’ailleurs eux-mêmes qui votent et qui départagent leurs confrères, et plus rarement leurs consœurs, ce qui est non moins problématique. Pour ne pas autoriser Roman Polanski à recevoir un prix, il aurait fallu lui interdire de concourir, pour des raisons morales.

Dans ce cas, pouvait-on permettre au réalisateur Ladj Ly, récompensé lui aussi pour le meilleur film avec « les misérables » de se présenter aux suffrages de la profession alors qu’il a fait l’objet d’une condamnation même s’il clame son innocence ? Pour ma part, je ne vois pas de bonne solution dans la censure et l’interdiction. Rien n’interdit, et elles ne s’en privent pas, aux opposantes de protester, de dénigrer le réalisateur, qui peut se défendre. Vous allez me dire que moi aussi j’évite l’obstacle, en semblant renvoyer dos à dos les parties en présence. Pas tout à fait. Je pense qu’il faut s’appuyer sur des règles de droit dans cette affaire comme dans d’autres, et que si le droit n’est pas adapté il faut le modifier. Notamment, il me semble nécessaire de revoir les règles de prescription qui empêchent trop souvent de rendre justice aux victimes. Il ne reste alors plus que le tribunal médiatique pour se faire entendre, et ce n’est pas la meilleure solution.

Commentaires  

#1 Josette 01-03-2020 14:02
En effet, il aurait été possible de censurer le réalisateur afin que symboliquement ses actes immoraux soient pris en compte à la hauteur de ce qu'ils représentent.
Mais peut-être que ceux qui ont le pouvoir de censurer n'ont pas la même notion d'éthique que ceux qui auraient aimé qu'on le censure.....
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