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Figure libre
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 27 septembre 2019 10:23
- Écrit par Claude Séné
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En patinage artistique, il existe deux exercices distincts. À l’occasion du décès de l’ancien président de la République Jacques Chirac, nous avons surtout pu observer des figures imposées. Tous ceux qui l’avaient combattu de son vivant se sont crus obligés de lui rendre un hommage appuyé, dont l’insincérité est souvent manifeste. Les plus rancuniers de ses adversaires se sont contentés d’un service minimum contrastant avec les panégyriques de circonstance. Le sujet ayant phagocyté l’intégralité de la presse et des réseaux sociaux, il m’a été impossible d’y échapper, mais je voudrais faire librement mon petit compliment.
On sait qu’il faut une ambition dévorante pour faire de la politique, surtout à un haut niveau. Il faut être prêt à tout, et spécialement à sacrifier sa famille et son entourage sur l’autel de sa carrière. Il a bien fallu écarter ses rivaux, se battre bec et ongles pour s’imposer, trahir les uns puis les autres. Jacques Chirac, dont la fronde a permis l’élection de Giscard D’Estaing, et qui sera payé en retour d’un tremplin de Premier ministre, n’hésitera pas à « tuer le père » pour voler de ses propres ailes. La monnaie de sa pièce lui sera rendue plus tard par Édouard Balladur, son ami de trente ans, mais il y survivra. Celui que les Guignols surnommeront « Supermenteur » devra aussi mettre les mains dans le cambouis pour se hisser à la mairie de Paris et y rester. Il sera le premier président de la République à être condamné en correctionnelle pour une affaire d’emplois fictifs. Comme président, son bilan est « contrasté » selon les commentateurs les plus indulgents. Il a été écologiste de papier en prononçant à Johannesburg un discours non suivi d’effet et s’est fait élire sur une promesse de réduction de la « fracture sociale » qui, visiblement, selon sa formule « lui en touchait une, sans faire bouger l’autre ».
Il aura fallu qu’il quitte le pouvoir pour devenir populaire. Son capital de sympathie a grandi au fur et à mesure qu’il n’était plus démenti par les faits, ce qui doit laisser beaucoup d’espoir à Emmanuel Macron pour son après destin présidentiel. Subitement, le public a oublié la dissolution ratée, la réforme avortée des retraites, la survivance de la Françafrique et les valises de billets, pour ne retenir que l’image du bon vivant, de l’ogre qui dévorait des tonnes de victuailles au Salon de l’Agriculture en avalant des hectolitres de Corona. Si l’on ajoute à cela l’amnésie bienfaitrice qui absout tous les péchés des vivants au moment de leur mort, on ne s’étonnerait pas qu’au moment de ses funérailles, qui ne pourront qu’être nationales, la foule se mette à scander : « Santo subito ! » pour demander sa béatification immédiate comme l’ancien pape Jean-Paul II.