Le jour D
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 6 juin 2019 10:43
- Écrit par Claude Séné
Les cérémonies de commémoration du débarquement allié en Normandie se sont déroulées en présence des vétérans, je devrais dire des survivants. 75 ans après, ils ne sont plus que quelques centaines parmi les plus jeunes des soldats américains, anglais ou canadiens, mais aussi belges, luxembourgeois, australiens, etc. sans oublier les 177 parachutistes français du commando Kieffer. Beaucoup d’entre eux, qui ont à présent entre 90 et 100 ans, s’étonnent d’être encore en vie et ne sont pas certains d’être en mesure d’assister aux prochaines festivités. C’est en quelque sorte une page qui se tourne.
C’est une situation qui s’est déjà produite dans le passé, quand les ultimes « poilus » de la guerre de 14-18 ont disparu. Le dernier d’entre eux, Lazare Ponticelli, s’est éteint en 2008 à l’âge de 110 ans, une longévité exceptionnelle qui lui a permis de survivre à deux conflits mondiaux. Pour moi, qui suis né quelques mois seulement avant le débarquement, la Deuxième Guerre mondiale était la référence d’actualité, celle qui avait touché la génération de mes parents, tandis que 14-18 représentait un passé déjà plus ancien, où mon grand-père avait été tué. Et je me rends compte tardivement que le glissement des générations fait de ces deux guerres des évènements, sinon contemporains, du moins liés dans un passé commun, heureusement révolu. Depuis l’armistice de mai 1945, nous avons eu la chance, en Europe, de vivre une période continue de paix, excepté en ex-Yougoslavie, malgré les tensions entre blocs antagonistes de l’Est et de l’Ouest, qui ont donné lieu à ce que l’on a appelé un peu abusivement « la guerre froide ».
Si plus personne, excepté une partie du peuple anglais, ne remet en question la construction européenne, qui a permis la réconciliation et assure tant bien que mal une entente économique, facteur de réussite commerciale, la représentation des pays aux cérémonies du 6 juin est symbolique du nouvel ordre mondial. D’un côté, les pays dits « occidentaux », que le président américain Donald Trump croit pouvoir diriger à sa guise au nom de sa puissance économique et militaire, de l’autre la Russie et la Chine, provisoirement liées par une entente de circonstance pour faire pièce à l’hégémonie américaine. Wladimir Poutine y a trouvé le moyen de faire croire au peuple que la Russie avait encore son mot à dire sur les grands équilibres planétaires, alors qu’elle est devenue une puissance moyenne, qui conserve simplement un pouvoir de nuisance. Quant au président chinois Xi Jinping, il attend son heure, celle qui verra son pays dépasser définitivement les États-Unis dans la course au développement économique. En paraphrasant Malraux, on pourrait dire que la 3e guerre mondiale sera économique ou ne sera pas.