Simplification

Ce n’est pas pour me vanter, mais j’ai l’impression très nette de faire partie des chouchous du ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, avec qui j’entretiens une relation épistolaire soutenue encore qu’à sens unique. Pas plus tard qu’aujourd’hui, il m’a encore adressé un courrier pour m’expliquer le fonctionnement de la retenue à la source de mes impôts, au cas où je ne l’aurais toujours pas compris. Ce qui m’incite à penser que les choses ne doivent pas être aussi simples qu’elles en ont l’air, puisqu’il faut m’expliquer aussi longtemps et aussi souvent.

Au départ, moi j’étais plutôt pour, du moins en ce qui concerne ma situation personnelle, simplissime, puisque je ne perçois qu’une pension de l’état, qui est donc aux premières loges pour prélever son dû, que je payais sans barguigner, bien que je n’approuvasse point totalement l’usage qui en était fait. Étant mensualisé, la régularisation de fin d’année permettait de lisser la dépense sans trop de difficultés. Les déductions fiscales liées à l’usage de chèques emploi service étaient intégrées dans le calcul et ma foi, ça se passait gentiment. Spontanément, j’avais imaginé que le prélèvement à la source se contenterait d’intégrer l’avance mensuelle du système antérieur dans le bulletin de salaire ou de pension, ce qui ne changerait pratiquement rien pour tous les mensualisés.

C’était compter sans le génie français et son administration, capables de compliquer les choses les plus simples. Selon mes calculs, je vais faire un petit crédit à l’état, qui lui-même va m’avancer des fonds pour que je puisse le payer. Comme je suis un petit contribuable, les sommes en jeu resteront modestes, mais ces mouvements de fonds dans les deux sens ne constituent certainement pas une simplification de nature à favoriser le consentement à l’impôt. Cela en dit long aussi sur l’incapacité à gérer « en temps réel » les dossiers fiscaux, même les plus simples, puisqu’à la limite un contribuable qui n’aurait dû verser ni recevoir le moindre euro, sera quand même amené à des mouvements financiers quand un simple jeu d’écriture aurait suffi. C’est ainsi que je devrais recevoir en juillet prochain un remboursement de la hausse de la CSG alors qu’il aurait suffi de ne pas me la prélever, puisque le ministère sait pertinemment qu’elle sera indue. Petit inconvénient pour le contribuable, perte de temps multipliée par le nombre de bénéficiaires pour les services de l’état. Croisons les doigts pour que l’ensemble du dispositif ne s’effondre pas sur lui-même comme une barre d’immeuble promise à la démolition. Les simples demandes de clarification ont déjà conduit à un engorgement monstre des services de l’administration fiscale. On n’ose pas imaginer les embouteillages en cas de bug majeur, de quoi faire regretter les embarras de circulation dus aux gilets jaunes.