Plein le dos

Le mal de dos a été régulièrement décrété « maladie du siècle ». La faute à un mode de vie trop sédentaire pour beaucoup de nos concitoyens et à un cercle vicieux dont on peut voir les effets pervers sur la société américaine dont nous suivons trop régulièrement le chemin avec quelques années de décalage. On prend la voiture pour quelques centaines de mètres, on se nourrit mal, l’obésité guette. Le surpoids, c’est l’ennemi principal quand on manque de muscles pour soutenir le corps. Et plus on est lourd, moins on peut faire l’exercice physique nécessaire à une bonne santé.

L’équation est bien connue. Le mal de dos est aussi trop souvent généré ou aggravé par des conditions de travail entrainant ce que l’on appelle des troubles musculo-squelettiques, pouvant déboucher sur de véritables maladies professionnelles. Voilà déjà longtemps que les gouvernements successifs ont les arrêts maladie dans le collimateur. Ils coûtent cher en indemnités journalières et creusent le déficit de la sécu. Comme l’état ne peut pas grand-chose à l’ergonomie des postes de travail, des technocrates ont imaginé de faire porter la charge de l’indemnisation sur les entreprises, ce que refuse énergiquement le Medef, bien entendu. Une autre piste semble prometteuse pour nos dirigeants bien aimés, toujours prompts à repérer la paille dans l’œil de leur voisin, c’est d’inventer le travail pendant le congé de maladie. C’est un projet très sérieux, lié au développement des technologies de travail à distance. Avec une jambe cassée par exemple, vous pourriez continuer à faire de la bureautique sur votre ordinateur personnel et transmettre vos données à l’entreprise. La philosophie sous-jacente à ce procédé, c’est la recherche permanente des « tire-au-flanc ». Ceux qui ne trouvent pas d’emploi en premier lieu, car ils ignorent que l’herbe est plus verte de l’autre côté de la rue, mais aussi les parasites qui se les roulent aux frais de la société en obtenant des congés de complaisance grâce à la complicité du corps médical.

Les dénonciateurs de la paresse naturelle des Français vont évidemment trouver du grain à moudre dans le procès en cours à Saint-Brieuc pour une escroquerie reprochée à un employé d’une entreprise de logistique. Employé comme manutentionnaire, le salarié s’est vu prescrire un arrêt de maladie d’une semaine pour une lombalgie sévère. Ce qui ne semble pas l’avoir trop handicapé au point de pouvoir prendre part à une course cycliste et avaler 250 km en 2 jours. Il participera ainsi à 16 courses entre avril et août, alors que les arrêts maladie se multiplient. L’employé peut difficilement nier les faits dans la mesure où il s’en est abondamment vanté sur son profil Facebook. Il peut se targuer en tout cas d’avoir fait beaucoup de tort à ceux qui souffrent effectivement de leurs conditions de travail.