Une arme par destination

Le fait de conduire un véhicule n’est pas, par nature, assimilable à un comportement délictueux visant à blesser ou tuer d’autres personnes. Cependant, il peut le devenir dans quelques cas exceptionnels, où la voiture se transforme en arme « par destination ». C’est ce qui semble ressortir de ce fait divers parisien, où un cycliste de 27 ans a perdu la vie à la suite d’une altercation avec le conducteur d’un SUV. Au point de départ, une affaire banale de conflit de circulation, où l’automobiliste, pressé, qui conduit sa fille à un rendez-vous médical, emprunte la piste cyclable pour gagner du temps. Ce faisant, il roule sur le pied du cycliste qui réagit en frappant sur le capot.

L’histoire aurait pu s’arrêter là, mais une dispute éclate, la voiture avance et roule sur le cycliste, qui décèdera de ses blessures. Plusieurs témoignages incitent à penser que l’automobiliste a agi volontairement. Il a été mis en examen et placé en détention provisoire pour meurtre. L’enquête devra déterminer le caractère accidentel ou volontaire de la collision, mais cet « incident » de circulation illustre bien les conflits potentiels engendrés par la nécessité d’un partage de la chaussée entre ses différents usagers. Ian Brossat, adjoint communiste à la mairie de Paris, rappelle à cette occasion son souhait d’interdire les SUV dans Paris. Je partage son avis. En ville particulièrement, faire rouler un véhicule de deux tonnes pour des trajets non indispensables est une aberration écologique. D’autant plus si la fonction 4x4 ne sert qu’à escalader les trottoirs ou les séparations des voies réservées aux vélos ou aux bus.

L’évolution des modes de vie et des déplacements ne simplifie en rien les nécessaires ajustements pour favoriser un « vivre ensemble ». L’apparition des trottinettes électriques, assimilées à des véhicules et pilotées par des conducteurs souvent peu ou mal formés au Code de la route, n’a rien arrangé. En ville, elles concurrencent les piétons sur les trottoirs, ou les vélos sur les pistes cyclables. En campagne, les usagers de ces trottinettes prennent des risques, en allant relativement vite, parfois à deux sur un engin non conçu pour cela, et souvent sans casque ni équipement adapté. Pour terminer, mentionnons une tendance qui se généralise, au moins dans le département où je réside, où la plupart des communes veulent démontrer leur bonne volonté écologique en créant des « liaisons » cyclables entre elles, y compris là où les chaussées sont trop étroites pour implanter des pistes permanentes pour les vélos dans les deux sens. Cela s’appelle un « chaussidou » pour « chaussée à circulation douce ». Personnellement, je n’y ai jamais vu un seul vélo. Cherchez l’erreur.