L’exception française

Le parlement européen a adopté le traité de libre-échange avec le Canada de Justin Trudeau, connu sous le nom de CETA, à une large majorité grâce à l’alliance des libéraux et des sociaux-démocrates, favorables au projet. Cependant, les eurodéputés français s’y sont opposés puisque seuls 16 sur 74 ont voté en faveur du texte. On se souvient que la Wallonie a longtemps bloqué le projet de traité avant de se satisfaire de quelques aménagements et de donner son feu vert. Le traité devra encore être ratifié par les 38 parlements nationaux et régionaux avant d’être complètement mis en œuvre.

Les apparences démocratiques sont donc sauves, si on laisse de côté le fait que la plus grande partie des dispositions sera appliquée progressivement et de manière provisoire sans attendre les résultats de cette consultation qui devrait durer des mois, sinon des années. Une politique du fait accompli qui soulève l’opposition des détracteurs du projet. Les députés européens n’ont, semble-t-il, pas tenu compte des 3 millions et demi de citoyens qui ont signé la pétition contre ce traité qui représente une menace pour la démocratie et risque de renforcer le pouvoir des multinationales. Les arguments des signataires sont solides et s’appuient notamment sur l’abandon des normes qui protègent les productions locales et la capacité des grands groupes à faire condamner les états qui porteraient atteinte à leurs intérêts.

Ce traité démontre une fois de plus que pour beaucoup d’états européens, notamment ceux qui ont rejoint l’Union de fraîche date, la communauté européenne n’est rien d’autre qu’un cartel économique, réuni par la conjonction d’intérêts commerciaux et propre à passer des accords avec d’autres entités similaires afin de préserver sa capacité à faire du bizness. Les questions humaines passent toujours au second plan, que ce soit en matière de droits de l’homme, de défense de l’environnement, ou de règles protectrices en matière de droit du travail et de la consommation. Nous sommes bien loin des idéaux qui ont présidé au projet des « pères fondateurs », dont un des principaux objectifs était de pacifier le continent européen pour éviter le retour de guerres meurtrières et fratricides. Cette Europe mercantile ne fait plus rêver, y compris ses plus ardents défenseurs. On a souvent opposé l’Europe des peuples à l’Europe des dirigeants, accusés de prendre les décisions dans l’isolement des cabinets de la Commission. Ce n’est pas par ce genre de décision que le Parlement européen convaincra les opinions publiques qu’il peut représenter une alternative démocratique à la gouvernance technocratique de Bruxelles ou aux conférences des chefs d’état et de gouvernement.

Commentaires  

#1 jacotte 86 20-02-2017 11:11
et que dire des virages que prend l'Europe politique ,ceci expliquant sans doute cela! Comment sortir de cette spirale?
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