Tranche de vie

Le hasard m’a remis en mémoire une chanson de François Béranger, où il décrit son itinéraire, confronté aux aléas de la vie, de l’école à la prison passant par le travail… et dont le refrain m’interpelle : « je suis encore à me demander après tant et tant d’années, à quoi ça sert de vivre et tout, à quoi ça sert en bref d’être né ? »

Vaste question, dont je ne détiens pas l’unique réponse, qui revient à se demander : quel est le sens de la vie ?

Tout homme vivant, conscient de sa condition, se la pose au cours de son bref séjour dans le temps. La question reste ouverte autant pour la philosophie que pour la religion, « l’homme est une énigme pour lui-même » Augustin.

Il y a les réponses religieuses, spirituelles, qui pensent que l’existence est reliée à quelque puissance supérieure, elles ont prévalu dans l’histoire de l’humanité à peu près dans toutes les cultures et à toutes les époques.

Il y a les réponses séculières, plus récentes, qui, ne contestant pas l’existence d’une transcendance, misent sur le bonheur humain pour améliorer la condition humaine, réduire l’injustice, la souffrance, la vie humaine représentant une fin en soi pour chercher le bonheur, parce qu’elle est la seule qui nous est dévolue.

Il y a les réponses hédonistes, pas d’horizon supérieur, pas de transcendance, il faut profiter pleinement de la vie, source de félicité, de plaisir, de bonheur immédiat.

La vie a bien sûr un sens physique, c’est le temps qui s’écoule de la naissance à la mort, sa direction doit suivre l’évolution de l’espèce humaine. Nietzsche pense que sa préservation, sa reproduction est une nécessité vitale, et que c’est là le but de l’existence ! Pour Durkheim, la conscience sociale est l’instrument qui révèle le sens de la vie. La vie est digne d’être vécue si nous avons des buts à atteindre, y compris en embrassant le malheur, car il est élément de la vie.

Individuellement, il y a aussi le sens de sa vie, qui varie selon les moments. On le trouve dans une dimension affective, l’amour, l’amitié, dans une dimension cognitive à travers ses convictions, ses pensées, ses choix artistiques et philosophiques, à partir de ses comportements, ses engagements, ses activités professionnelles ou personnelles.

Les situations de crise qui menacent notre sécurité et nos certitudes entraînent une perte de notre capacité à nous connecter aux autres, et nous conduisent au chemin de la dépression, elles touchent tout le monde, les plus jeunes en ce moment peuvent se demander comment vivre, c’est-à-dire, désirer, rêver, espérer, croire, poursuivre des buts ? Nietzsche et le « gai savoir » devraient les aider !

Et si la question était ailleurs, si c’était : pourquoi se la poser à ce moment précis de mon histoire ?

La diminution du lien social, la difficulté de visualiser l’avenir, la sensation que les quelques années restantes vont sérieusement manquer d’enthousiasme et de fantaisie… tout ça a en effet un léger parfum de déprime que je vais régler par une pirouette.

Deux mamans juives sont au salon de thé, la première soupire : « ces gâteaux sont de plus en plus mauvais », la deuxième répond : « et en plus ils sont de plus en plus petits » !

C’est comme la vie, elle est de plus en plus courte, mais on mord dedans quand même ! d’après Woody Allen.

Rassurez-vous j’ai encore de bonnes dents !

 

L’invitée du dimanche