Le choix des armes

Nous y voilà ! à moins de 100 jours du premier tour de l’élection présidentielle, alors que nous connaissons avec une quasi-certitude l’identité des différents candidats qui vont s’affronter, chacun fourbit ses armes. Avec une élégance toute relative, le président sortant, Emmanuel Macron, dont la candidature ne fait plus guère de doute, si tant est qu’il y ait eu le moindre suspense à ce sujet, a désigné ses adversaires et donné le ton de sa future campagne en fustigeant les mauvais Français, indignes de la citoyenneté nationale, qu’il veut emmerder au maximum, pour cajoler les 90 % qu’il estime devoir être de son côté.

Une élection présidentielle n’est pas un duel, du moins au premier tour, mais chacun des candidats voudrait que l’affrontement se déroule sur le terrain où il se sent le plus à l’aise et avec les armes qui lui sont les plus familières. Tandis qu’Emmanuel Macron se pose en Père de la Nation, qui protège son peuple de la maladie, contre son gré s’il le faut, Valérie Pécresse s’est déterminée à employer les grands moyens en allant déterrer, non pas la hache de guerre, mais le fameux Karcher popularisé par son mentor Nicolas Sarkozy, et depuis remisé dans quelque cave obscure voire aux oubliettes. Voilà qui va faire monter le niveau. Il ne lui reste plus qu’à aller provoquer un quidam en le traitant de pauvre con au Salon de l’Agriculture pour parfaire l’analogie, tandis que le président sortant s’appliquera à guérir les écrouelles.

Avant son entrée en campagne, Éric Zemmour avait tenté d’imposer le thème de l’immigration zéro, un classique qui fait toujours sa petite recette sur fond de racisme et de xénophobie, la grande spécialité du polémiste, mais le procédé fait long feu pour le moment. Emmanuel Macron mise gros sur la situation sanitaire, mais c’est un peu du quitte ou double. Personne ne sait lire le résultat dans le marc de café de la pandémie. Valérie Pécresse voudrait donc orienter les débats sur l’insécurité, dont elle pense que c’est le talon d’Achille de la Macronie. Quant à Marine Le Pen, débordée sur sa droite, un comble, elle fignole une image dédiabolisée de présidentiable, voulant récupérer les déçus du macronisme, et ils sont nombreux. Voilà pour les mieux classés des sondages. Toujours en embuscade, mais un peu décroché, Mélenchon table sur une campagne dynamique, avec des moyens modernes, pour renverser la table dans un « blitzkrieg », une guerre éclair, et créer la surprise en accédant au 2e tour. Pour les autres, ils essaient d’exister, mais la mayonnaise n’a pas l’air de prendre pour l’instant, y compris pour la candidate éventuelle de la dernière heure, Christiane Taubira, peut-être partie trop tard pour espérer quelque chose.