La parenthèse désenchantée

Cette période d’une semaine coincée entre les fêtes de Noël et le passage à la nouvelle année m’a toujours semblée hors du temps. Une impression renforcée par les médias, qui observent ce qu’il est convenu d’appeler la trêve des confiseurs, en évitant soigneusement les sujets importants ou risquant de déranger la quiétude supposée des audiences prétendument assoupies. C’est ainsi qu’en entendant ce matin sur France Inter la rediffusion d’une chronique de 2018 de l’excellent François Morel, j’ai été tenté, moi aussi, de piocher dans mon stock existant plutôt que de me creuser la tête à écrire un texte original.

Je n’ai malheureusement pas le talent des chroniqueurs professionnels, et les textes que je tente maladroitement de produire, s’ils possèdent à mon humble avis, la qualité d’être sincères, ne sont pas dignes de passer à la postérité et sont toujours en lien avec une actualité plus ou moins récente. Et puis, comme dans un sketch de Bernard Haller où il incarne un pianiste fatigué de jouer tous les soirs la sonate au clair de lune et qui envisage d’accélérer le tempo pour en finir plus rapidement et qui y renonce finalement, au motif que le public s’apercevrait du subterfuge, un reste de conscience professionnelle m’interdit ce genre de facilité. Cependant, je me rends bien compte que je suis parmi les derniers des mohicans en procédant de la sorte. Je me demande même, si l’on diffusait à la radio ou à la télévision un journal de l’année dernière, si quelqu’un dénoncerait la supercherie. Parce que la plaisanterie ne fait que commencer, et nous allons en bouffer jusqu’à plus soif, si j’ose dire, du best of, de la rediffusion, de la rétrospective et même, last but not least, du bêtisier !

Et tout ça pour quoi ? Parce que les Parisiens qui égaient nos journées et parfois nos soirées et nos nuits partent en vacances à la neige, et qu’ils s’imaginent que c’est leur personne et non pas le concept qui pousse les gens à suivre leurs émissions. Déjà, l’été leur paraît un désert bien long à traverser avec le risque que les remplaçants en profitent pour leur piquer leur place à la rentrée. Alors l’hiver, on ne prend aucun risque, à part celui de se casser une jambe sur les pistes enneigées. Je doute pourtant que cela fasse l’affaire de qui que ce soit, en tout cas pas la mienne. Déjà que cette sacrée crise sanitaire qui n’en finit pas nous donne l’impression de revivre tous les jours la fête de la marmotte et qu’on a l’impression désagréable en écoutant plus ou moins distraitement le Premier ministre ou celui de la Santé, d’un « déjà vu » à force de précéder l’évènement, on se dit : « vivement 2022 » et qu’on en finisse !