Quand les mots dépassent la pensée

Dans le cas de Jean-Michel Blanquer, son expression « les lycéens et collégiens non vaccinés seront évincés » révèle plutôt son absence de réflexion sur la portée de cette formulation pour le moins malheureuse pour justifier une mesure perçue comme discriminatoire pour la rentrée prochaine en cas d’apparition de cas positifs de covid-19 dans les établissements scolaires du second degré. Pour un ministre de l’éducation, sa méconnaissance des règles de base en communication donne une impression désastreuse de mépris pour ses interlocuteurs dont il est malheureusement coutumier.

La même réalité, présentée de façon positive, aurait consisté à dire simplement que les élèves vaccinés pouvaient continuer à fréquenter l’école puisqu’ils ne risquaient pas d’attraper ou de transmettre l’affection. Les cas d’éviction ne sont pas une nouveauté dans l’école. Ils sont réservés à certaines maladies contagieuses, telles que la rougeole par exemple, pour des raisons évidentes et sont alors bien acceptés par les familles. En choisissant ce terme d’évincer, le ministre a ouvert tout un champ lexical négatif relié à l’exclusion. Citons, pêle-mêle, les synonymes relevés dans les dictionnaires : chasser, expulser, mettre à la porte, renvoyer, mettre dehors… ou, dans un autre contexte, celui d’écarter, de se débarrasser d’un concurrent, etc. je présume d’ailleurs que ce nuage de sens qui entoure le terme d’évincer est resté largement inconscient, mais il se transmet aux interlocuteurs, même à l’insu de son plein gré. Il faut dire que le ministre n’en est pas à ça près. Voilà un individu qui est devenu recteur d’Académie en 2004 sans avoir occupé le moindre poste au préalable dans l’éducation nationale après des études de droit. Auparavant, il a été chercheur à l’institut français d’études andines à Bogota (Colombie) sans parler un mot d’espagnol. Plus tard, il publiera une tribune pour réhabiliter l’usage du passé simple, pourtant bien compliqué, au moins pour lui, puisqu’il se révèlera incapable de conjuguer le verbe courir dans l’émission « au tableau » à la télévision.

Je n’ai jamais compris depuis la nomination de ce haut fonctionnaire à la tête du ministère de l’Éducation l’engouement de certains pour ses conceptions qui se disent modernistes quand elles sont en réalité rétrogrades et passéistes. Mr Blanquer porte toujours la marque de son mentor Sarkozy avec le culte de l’évaluation chiffrée et la culture du résultat quantitatif aux dépens du qualitatif. Curieusement, il n’a pas eu de mal à passer à la compétition acharnée des premiers de cordée prônée par le promoteur de la start-up nation. Il reste cependant une sorte de boulet pour le chef de l’état quand il prend des positions balourdes, par exemple sur le voile, ou le supposé islamogauchisme de l’université. Bref, il illustre à la perfection la formule de Coluche selon laquelle « en politique, les études c’est cinq ans de droit et tout le reste de travers ».

Commentaires  

#1 massé 29-07-2021 13:20
Coluche ce grand philosophe aurait dit aussi" il vendait de l'intelligence , il n'avait pas un échantillon sur lui"
Citer