Le fait accompli

Le conflit israélo-palestinien qui dure depuis la création de l’état d’Israël en 1948 avec des phases plus aigües et des moments plus apaisés a franchi un nouveau palier depuis quelques jours, où chaque camp « réplique » à l’autre sans que l’on puisse vraiment démêler la fameuse question des cours de récréation : « qui a commencé ? » Tout dépend de quoi l’on parle. Les Israéliens considèrent que l’agresseur est le Hamas, qui dirige la bande de Gaza et a déclenché des tirs massifs de roquettes sur le territoire d’Israël, tandis que les Palestiniens s’estiment agressés par la politique d’expulsion de leurs ressortissants de la capitale, Jérusalem.

Chacun campe sur son bon droit, et cela depuis l’origine. La terre appartient au premier occupant, mais comment déterminer qui était là avant l’autre ? Est-ce le nomade, éleveur de troupeaux, obligé de se déplacer pour nourrir ses animaux, ou le colon, le bâtisseur, qui a valorisé la terre ? La terre « promise » n’en finit pas d’être disputée par les héritiers de ces lointains ancêtres, qui estiment détenir la légitimité morale sur ce territoire. L’ONU, animée de bons sentiments, a voulu compenser le drame terrible de la Shoah en offrant une patrie aux juifs rescapés du génocide fomenté par les nazis. Elle a négligé de reconnaitre les droits des autres habitants de la région, les Arabes, musulmans ou chrétiens. Pour rendre viable l’état qui leur était alloué, les Israéliens ont cru devoir annexer les territoires qui les entouraient, en particulier la Cisjordanie qu’ils considèrent comme indispensable à leur sécurité. Depuis son accession au pouvoir, Benyamin Netanyahou n’a eu de cesse de saper la perspective d’une solution de paix à deux états, en tolérant ou en favorisant l’implantation de colonies en territoire palestinien, rendant impossible à terme la création d’un état autonome, criblé d’enclaves étrangères.

Cette politique destinée à lui permettre de se maintenir au pouvoir a déclenché symétriquement un raidissement du Hamas, également en difficulté devant son opinion publique. Les dirigeants des deux parties sont amenés à une escalade verbale et physique, qui incite beaucoup d’observateurs à les renvoyer dos à dos. La France condamne fermement les tirs revendiqués par le Hamas. C’est oublier que les forces sont inégales. Israël a les moyens de se défendre contre les tirs de roquettes palestiniennes et dispose d’une armée parmi les plus puissantes et les mieux équipées du monde. Il suffit de regarder le bilan provisoire des affrontements : 7 Israéliens et 103 Palestiniens tués depuis le début des combats. Si la droite israélienne parvient à ses fins et que le « grand Israël » finit par s’imposer, avec une population composée à 50 % de juifs et à 50 % d’Arabes, ces derniers auront-ils le droit de vote, ou devront-ils se contenter, comme à Jérusalem-Est, du statut de résident, sans accès aux décisions et à la démocratie ?