Un joli mois de mai

Il y a 40 ans tout pile, le 10 mai 1981, François Mitterrand devenait le premier président de gauche, même si certains lui contesteront cette filiation, de la 5e république. Cela faisait 23 ans presque jour pour jour que nous subissions le pouvoir absolu d’une droite, longtemps camouflée sous un gaullisme se prétendant au-dessus des partis, puis le pompidolisme et le giscardisme. On n’en finissait plus d’espérer une alternance démocratique. Les vieux militants se lamentaient à l’idée qu’ils ne le verraient pas de leur vivant, mais les attentes étaient à la mesure de l’espoir qu’elles avaient fait naître.

Avec une pointe d’humour, les manifestants sortis pour fêter la victoire de la gauche malgré la pluie, scandaient une revendication toute symbolique : « Mitterrand ! du soleil ! » Sous la plaisanterie perçait la folle espérance qu’enfin tout était possible et que le slogan « changer la vie, ici et maintenant » pouvait devenir réalité. Le « peuple de gauche » avait tellement envie d’y croire, il y avait tellement de soif de changement, que ce mois de mai berçait beaucoup d’illusions, mais pas seulement. Les premiers mois et les premières années ont permis quelques avancées, dont l’abolition de la peine de mort, qui restera un marqueur de cette période, avant le tournant de la rigueur, qui signera un retour à la realpolitik.

Si les mois d’avril sont meurtriers, à en croire le film de Laurent Heinemann, les grands évènements surviennent souvent en mai, comme si l’histoire décidait d’y faire ce qui lui plait. Pour ma part, c’est le coup d’État du général de Gaulle le 13 mai 1958 qui sera le début d’une conscience politique. Je n’avais pas connu le personnage historique de 1940 et son appel à la résistance. Je ne voyais que le militaire qui prenait le pouvoir contre les instances civiles démocratiquement élues pour prolonger une politique colonialiste en défendant l’Algérie française, qu’il s’empressera de liquider ensuite. Comme le président actuel, de Gaulle tentera sans arrêt de brouiller les cartes pour se maintenir au pouvoir, jusqu’au référendum perdu en avril 1969, qui amènera son départ. C’est peut-être pourquoi Macron traine des pieds pour organiser la consultation populaire promise afin d’inscrire l’écologie dans la constitution.

Il m’aura fallu ronger mon frein pendant les années de plomb du gaullisme triomphant, mais j’ai vraiment cru, avec la naïveté de la jeunesse, que les « évènements » de mai 1968 allaient finir par devenir une insurrection, ou une révolte, et pourquoi pas une révolution ? La fameuse « convergence des luttes » semblait devenir réalité avec des millions de grévistes, un pays à l’arrêt, un pouvoir désemparé. Il ne manquait qu’une incarnation au mouvement. Pierre Mendès France est présent au meeting de Charléty, mais laisse passer le train de l’histoire. Il faudra encore 13 ans pour que la gauche s’organise et soutienne la candidature de François Mitterrand.

Commentaires  

#1 jacotte 86 10-05-2021 11:06
Fanch reviens, on a plus les mêmes à la maison
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