Si on chantait…

… Pas seulement pour « passer le temps ». (Aragon par Léo Ferré)

Une chanson, c’est un texte mis en musique destiné à être chanté. Pas de chanson sans musique, ce qui exclut pour moi les formes nouvelles artistiques de rap et de slam qui ne sont que des déclamations dont je ne nie pas l’importance. La première musique connue date de 3400 ans avant J.-C. et les chants liturgiques grégoriens datent du neuvième siècle. Ces chants devenus païens n’ont pas cessé d’évoluer, devenus des chansons qui, profitant de moyens de diffusion multiples de plus en plus accessibles, font partie plus que jamais de notre quotidien. 

Les chansons sont des objets historiques, ce sont des acteurs de l’histoire, elles ne sont pas là seulement pour nous émouvoir, mais elles ont une vraie influence sur l’évolution des mœurs, sur les événements, quand elles rencontrent un public qui attendait leur message.

Illustration non exhaustive.

Notre hymne national « la Marseillaise » est là pour galvaniser le peuple, et l’encourager à défendre sa liberté. 

« La Sambre et Meuse » en 1867, stimule un rêve de revanche, c’est une mise en condition pour le grand massacre de la Terre 14-18

« L’internationale », 1871, encourage les peuples du monde à être solidaires.

« La chanson de Craonne », 1917, crée, est un hymne pacifiste désespéré, au cœur de la boucherie de la Première Guerre mondiale.

 « le chant des partisans » en 1943, deviendra, vu les circonstances, un deuxième hymne national, éclairant la notion de résistance.

« Le déserteur » en 1954, Boris Vian clame son antimilitarisme contre le conflit en Indochine.

« Je vais revoir ma blonde » en 1956, en pleine guerre d’Algérie, exprime le souhait des conscrits de retourner chez eux.

« Nuit et brouillard » en 1963, rappelle à des millions de Français le souvenir des camps de concentration nazis.

Les chansons ne sont pas en reste pour rendre compte d’une évolution morale et sociale, « La mauvaise réputation » Brassens, 1952, met le doigt sur une société rétrograde et conservatrice.

« Nous sommes deux sœurs jumelles » 1967, première chanson de femmes émancipées, ose parler de nudité.

« Les divorcés » 1973, Delpech illustre une autre manière non conflictuelle de se séparer, on inscrira d’ailleurs dans la loi le consentement mutuel.

« Une femme avec une femme » de Mecano, reprise en 2003 par Saya, Lara Fabian en 2014, officialise l’homosexualité féminine

« Allô maman bobo » Souchon, 1977, c’est la fin du machisme, l’expression du nouvel homme, qui avoue sa fragilité.

 « Ne me quitte pas » par Brel 1959, avoue son désarroi s’il perd l’amour.

Les chansons d’amour, éternelles, universelles, savent traverser le temps, et s’inspirent parfois des poètes, Aragon, Prévert…

 « Le tourbillon de la vie » 1957 Jeanne Moreau, nous renvoie à la fragilité des sentiments…

« L’été indien » Joe Dassin 1975, fait une promesse d’amour éternel, et Polnareff revendique de faire « l’amour avec toi… » 

Qu’elles soient engagées, ou dites populaires, même « bébêtes » (les sardines, passe-moi l’épongeFélicie aussi) elles sont tenaces dans les mémoires, montrant bien qu’elles s’inscrivent d’une façon indélébile dans notre histoire.

(Le ministère de l’Éducation nationale, dans son programme d’éducation musicale, a fait un choix de chansons incontournables pour en affirmer son appartenance)

L’invitée du dimanche