Pas juste une réforme
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 18 janvier 2023 10:44
- Écrit par Claude Séné
À la veille d’une mobilisation qui promet d’être massive, le gouvernement s’est découvert une passion tardive, celle de la justice. Il faut absolument que dans un océan d’injustice, nos dirigeants préservent un îlot où tout le monde aurait un traitement égalitaire, celui de la retraite. Tous les ministres qui se succèdent devant les micros et les caméras n’ont que ce mot à la bouche, celui d’une réforme « juste ». À tel point qu’ils ne supportent pas l’idée que certains de leurs administrés pourraient toucher moins de 1200 euros par mois, observant à juste titre qu’avec ça, on survit, sans plus.
Ce simple correctif suffit à démontrer que le régime proposé avec l’allongement de la durée de cotisation et le report de l’âge légal de départ à 64 ans ne permet pas, à lui seul, de corriger les inégalités sociales, ce dont on se doutait un peu. Un retraité lambda touchera beaucoup moins que le PDG qui bénéficie d’une retraite « chapeau », tout comme lorsqu’il était en activité. Si nos dirigeants voulaient s’attaquer sérieusement aux disparités entre les retraités, il faudrait commencer par réduire sensiblement le différentiel entre les salariés, sans parler des superprofits. Parmi les solutions alternatives destinées à réduire ou empêcher les déficits du régime des retraites à moyen et long terme, il y en a une qui ferait d’une pierre deux coups, c’est une meilleure répartition des revenus liés au travail. Si les gens gagnaient mieux leur vie, le même taux de cotisations sociales générerait mécaniquement des augmentations de recettes qui résoudraient une bonne partie du déficit annoncé, et ils en profiteraient sans attendre, ce qui permettrait une relance de l’économie.
Entre autres inégalités, la disparité criante des salaires entre les femmes et les hommes, qui n’est toujours pas résorbée malgré les déclarations d’intention des gouvernements successifs, est un chantier qui pourrait, à lui seul, contribuer à un meilleur équilibre à la fois pendant l’activité, et pendant la période de la retraite. Vous voulez plus de justice sociale ? Je dis : « chiche ! » tirez donc les premiers, messieurs les ministres. Je ne vous demande même pas de sacrifier une partie de votre rémunération, qui vous place clairement du côté des nantis. Si déjà le salaire minimum permettait de vivre, se loger, se chauffer, se déplacer, manger décemment, les effets induits sur les retraites qui sont indexées sur les revenus en activité approcheraient ou dépasseraient les revenus prélevés sur le dos des actifs avec deux années supplémentaires de cotisations. Et si l’état souhaite une politique volontariste favorisant les plus bas revenus, qu’il cesse de promouvoir les primes de toutes sortes sur lesquelles ne repose aucune cotisation sociale, pour distribuer du vrai salaire, base de toute solidarité. Au vu du retard accumulé dans ce domaine, ce serait plus qu’une réforme, une vraie révolution.