Sanctions et dissuasion

Et c’est reparti comme en 14. En 2014, s’entend. Déjà, des sanctions économiques avaient été prises contre la Russie à la suite de l’annexion de la Crimée, conquise presque sans coup férir, et conservée par Wladimir Poutine malgré une réprobation internationale massive. De telles représailles ne sont visiblement pas de nature à modifier les plans de l’autocrate russe, elles ne l’ont pas été et ne le seront pas davantage dans un avenir proche. Tout le monde le sait. Poutine le sait. Les dirigeants occidentaux le savent. Pire encore, des sanctions économiques plus fortes encore ne suffiraient sans doute pas à dissuader le président russe de poursuivre un objectif d’extension territoriale.

Si une mesure, par exemple l’exclusion du système bancaire mondial Swift, était de nature à causer un dommage insupportable à l’économie russe, elle entraînerait, selon le chef du Kremlin, des représailles apocalyptiques, en faisant allusion au fait que la Russie est une puissance nucléaire. Jean-Yves Le Drian, le ministre des Affaires étrangères, a cru bon de répliquer que la France aussi possédait l’arme atomique. Toute la question est de savoir si les uns ou les autres seraient prêts à s’en servir. Un des conseils de base aux parents qui ont des difficultés dans l’éducation de leurs enfants, c’est de ne jamais rien promettre, en positif comme en négatif, qu’on ne soit pas prêt à tenir. Toute la stratégie militaire voulue par le Général de Gaulle a reposé sur la sanctuarisation du territoire national et la capacité à infliger des dommages importants à un agresseur éventuel, quel qu’il soit, même disposant d’un arsenal nucléaire plus fourni que le nôtre. Cette menace était supposée dissuasive et a fonctionné comme telle, tant qu’a régné ce que l’on a appelé « l’équilibre de la terreur ».

L’épisode des missiles de Cuba, installés par les Soviétiques et menaçant directement le territoire américain en est une parfaite illustration. Nikita Khrouchtchev et John Fitzgerald Kennedy finiront par trouver un accord pour éviter une guerre mondiale nucléaire catastrophique. Depuis, des guerres conventionnelles et limitées se sont produites dans différentes régions du monde, laissant régner une incertitude inquiétante. Le club très fermé des puissances nucléaires ne cesse d’accepter de nouveaux membres, et l’on voit venir l’éventualité d’une menace terroriste incluant les armes atomiques. D’ores et déjà, le président Wladimir Poutine est suffisamment imprévisible pour qu’on ne puisse pas exclure qu’il provoque un bras de fer avec les Occidentaux, en partant du principe qu’à ce jeu-là, c’est le plus déterminé qui gagne, et que ses adversaires caleront les premiers. Il est donc inutile, et dangereux, d’agiter une menace nucléaire devant Poutine, au risque qu’il nous prenne au mot. Toute sanction mise en œuvre est un levier de moins pour établir un rapport de force, le seul langage que comprenne le dictateur russe, et il faut montrer les muscles pour ne pas avoir à les utiliser.

Commentaires  

#1 jacotte86 26-02-2022 12:30
ou sont nos muscles?
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