Et surtout la santé !

Monsieur le Président, je vous fais une lettre, que vous lirez peut-être, si vous avez le temps. Rassurez-vous, je ne vais pas déserter, je crois qu’on vous a déjà fait le coup, à vous ou à l’un de vos semblables. Non, j’ai simplement ouï dire que vous m’aviez adressé vos vœux, hier au soir, que n’ai pas entendus, mais dont je me doute de la teneur. Comme je suis quelqu’un qui se flatte d’avoir été bien élevé par des parents eux-mêmes soucieux des bonnes manières, je me devais donc de vous répondre.

Si je vous souhaite une bonne année 2022, c’est avant tout pour que puissiez y prendre un repos bien mérité. En paraphrasant Brassens et ses stances à un cambrioleur, vous vous êtes introduit dans nos vies il y a près de 5 ans un peu par effraction, et toute forme de récidive abolirait le charme, tout relatif d’ailleurs, celui de la bourgeoisie, qui n’est supportable que très discret. Vraiment, Monsieur le Président, vous en avez fait déjà beaucoup, d’aucuns diront même trop, et en tout état de cause, suffisamment. Il faut penser un peu à vous maintenant. Gardez la présidence de l’Europe, si ça vous fait plaisir, et que les autres pays y consentent, ça vous occupera, et nous, ça nous permettra de souffler un peu. Faites le point, pensez à votre famille, profitez de la rente à vie qui vous met à l’abri du besoin, rédigez vos mémoires : le moindre candidat de téléréalité qui dépasse l’âge fatidique de trente ans a publié les siennes depuis longtemps. Qui sait, avec une relectrice à la maison, vous pourriez même vous passer du recours à un nègre pour les écrire.

Vous qui êtes passé par l’épreuve de la maladie, vous avez pu vous rendre compte à quel point cela relativisait les soucis et les vicissitudes de l’existence. Je vous en supplie, soyez égoïste, pensez à vous ! et si vous ne le faites pas pour vous, faites-le pour nous. Je vous assure que vous en sortirez grandi. Ne cherchez pas à mourir sur scène comme Molière, Dalida ou Pompidou. Voyez comment Jacques Chirac est devenu populaire après avoir quitté le pouvoir, alors qu’il plafonnait dans les enquêtes d’opinion, les Français lui ont tout pardonné, pourquoi pas à vous ? Je suis sûr que vous pourrez aller trinquer avec les gilets jaunes sur les ronds-points si vous renoncez à vous présenter ; c’est quand même mieux que le goudron et les plumes ! Et puis réfléchissez à ne pas faire le combat de trop, comme Donald Trump, qui aura bien du mal à faire son come-back dans trois ans, comme il l’espère. Donc, je me répète, tous mes vœux, Monsieur le Président, et surtout une bonne santé pour profiter de votre retraite.