La culture du secret
- Détails
- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 6 octobre 2021 11:01
- Écrit par Claude Séné
Ce n’est pas un hasard si la dernière enquête en date du Consortium international de journalistes d’investigation porte le nom de « Pandora papers ». En référence à la précédente révélation des évasions fiscales révélées par des fuites dans un cabinet d’avocats panaméen, d’où le nom de « Panama papers », mais aussi au personnage mythologique, dont la célèbre boîte n’aurait jamais dû être ouverte, car elle contenait tous les maux de la terre. Comme la boîte de Pandore, une fois la vérité révélée, on ne peut plus la refermer, et le scandale arrive.
L’atroce vérité dont il est question ici, c’est encore une fois celle de l’inégalité sociale qui permet à certains, généralement des gens puissants, de dissimuler leur fortune et d’éviter de payer des impôts sur leurs revenus, quelle qu’en soit la nature. La plupart du temps, les méthodes utilisées par les avocats fiscalistes ne sont pas illégales. Ils profitent de failles dans le système, de législations inadaptées, et leurs pratiques ne déboucheraient pas sur des condamnations pénales. Leurs procédés n’en demeurent pas moins choquants pour l’immense majorité des citoyens qui ne peuvent rien dissimuler et doivent payer « plein pot ». Le résultat le plus concret est illustré par le taux très bas d’imposition des grandes sociétés. Les enquêtes journalistiques utilisent une arme malheureusement insuffisamment dissuasive, celle du « name and shame », qui consiste à les dénoncer pour faire honte aux tricheurs. Force est de constater que cette fois-ci encore, les personnalités mises en cause nient tout en bloc.
Une stratégie éprouvée dans d’autres affaires révélées par des donneurs d’alerte, comme Irène Frachon dans le scandale du Médiator, où le laboratoire Servier a tout fait pour étouffer puis retarder sa condamnation par la justice. On peut également s’attendre à une bataille médiatique et peut-être judiciaire après les dénonciations d’une ancienne employée de Facebook qui révèle l’opacité du fonctionnement de la multinationale, et privilégie le profit maximal au détriment des intérêts de ses clients, en les laissant exposés à la désinformation et à la propagande. Frances Haugen indique que Facebook n’arrive à intercepter que 5 à 10 % des contenus haineux et de désinformation, ce qui était son travail au sein de l’entreprise, et que Mark Zuckerberg a purement et simplement supprimé après l’élection présidentielle, pour maximiser les profits. L’entreprise est dirigée par des algorithmes dont le but est de distribuer un service, rendu addictif afin de diffuser des publicités payantes. Pour la forme, Facebook et ses filiales, Instagram, Whats’app et Messenger, font une chasse absurde à la nudité, et laissent passer des images ou des propos beaucoup plus dangereux, et nocifs pour leurs abonnés. Dans ces différentes affaires, le secret est la règle, et la transparence, le seul moyen de lutter efficacement contre les excès d’un système tentaculaire.