La magie de Noël
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 26 décembre 2019 10:34
- Écrit par Claude Séné
Si l’on peut parler de situation bloquée, c’est bien celle qui oppose le gouvernement, qui veut imposer à tout prix une réforme des retraites inspirant la plus grande méfiance à la plupart de ceux qui sont supposés en bénéficier, et les salariés qui se rendent compte qu’ils ont beaucoup à y perdre. Voilà plus de 18 mois que les discussions n’ont pas permis de dégager un consensus, et pour couronner le tout, le ministre chargé du dossier a été contraint de démissionner et il a été remplacé par un type capable de licencier une salariée pour une histoire de viennoiserie à 80 centimes.
N’importe quel observateur sensé vous dirait que c’est mort de chez mort, que les positions des adversaires sociaux sont irréconciliables, que le gouvernement préfèrera laisser couler le navire en se fracassant sur les récifs plutôt que de changer de route, quitte à ce que le capitaine président s’abîme avec lui. Et voilà que l’on se rend compte qu’avec un peu de bonne volonté les choses s’apaisent. Figurez-vous qu’il aura suffi que les syndicats de pilotes et du personnel navigant déposent un préavis de grève pour le 3 janvier pour que les discussions qui étaient enlisées depuis des mois sur leurs revendications soient examinées et prises en compte. Et l’impossible a été réalisé en une demi-journée. Il n’a même pas été nécessaire de mobiliser la ministre chargée des transports qui a pu poursuivre tranquillement ses vacances à Marrakech en plein conflit social et en toute indécence. Le secrétaire d’État nouvellement nommé, Laurent Pietraswieski, avait visiblement carte blanche pour déclarer que le bar était ouvert et que les personnels obtiendraient ce qu’ils voulaient, du moment qu’ils ne rajoutaient pas un conflit supplémentaire et qu’ils ne gâchent pas le Noël du Président.
Tout le monde a bien compris que la réforme des retraites est destinée à instaurer un régime « universel », c’est-à-dire pour tout le monde ? Oui, mais non ! les pilotes, hôtesses et stewards pourront partir plus tôt, sans décote. Comme les militaires. Ou les policiers. Ou toute autre catégorie qui aura les moyens de l’imposer. Au hasard, les députés et les sénateurs, par exemple. Tout est préférable à admettre que le projet n’est pas abouti, que toutes les conséquences n’ont pas été mesurées, que l’on n’est sans doute pas capable immédiatement de financer les bouleversements nécessaires à éviter de pénaliser lourdement certains personnels, comme les enseignants. Pour éviter un déficit potentiel à moyen ou long terme, il va falloir en créer un immédiat. Pour corriger des injustices, on va en créer de nouvelles et l’on va mettre le pays dans un état d’incertitude et d’insécurité durable pour un combat douteux destiné à flatter l’ego du président. Alors qu’en une seule annonce : on reporte ! la situation peut revenir à la normale.