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L’amour sublimé
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le dimanche 19 août 2018 09:40
- Écrit par L'invitée du dimanche
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Ce pourrait être celui de Bérénice, dont le personnage donne le titre de la tragédie écrite en 1670.
Racine, dans sa préface, explique qu’il n’est pas nécessaire pour une tragédie qu’il y ait du sang et des morts, mais des acteurs héroïques et des passions excitées. Nous voilà donc prévenus, personne ne mourra dans cette œuvre.
Bérénice, reine de Palestine, aime et est aimée de l’empereur romain Titus, dont elle est la maîtresse depuis cinq ans, et qui lui a promis le mariage. Seulement, les lois de Rome interdisant à un empereur d’épouser une reine, Titus se voit contraint de renvoyer son aimée en Orient. Si l’on ajoute à cela un troisième personnage, Antiochus, ami de Titus et amoureux aussi de Bérénice, on réunit tous les éléments de dilemmes et de sentiments humains : passion, jalousie, trahison, désespoir, susceptibles de nous plonger dans les drames.
Bérénice personnage central du drame, parle le langage de l’amour, elle est amoureuse avant d’être reine, elle ne veut pas tenir compte des exigences du pouvoir qui guide Titus dans ses actes. Ambitieuse, elle le voudrait maître de son destin, capable de la choisir pour impératrice contre la pression des sénateurs.
Désespérée de sa décision de la renvoyer en Judée, elle utilise toutes les ruses et les arguments en son pouvoir pour sauver son amour, allant jusqu’à proposer d’être une simple concubine puis d’utiliser le chantage de son suicide comme dernier argument.
Terriblement humaine, après avoir montré de la rancœur, de la révolte et de l’indignation sur ce qui pourrait être la lâcheté de Titus à ne pas lui annoncer lui-même sa disgrâce (il demande à Antiochus d’être son messager), elle en devient injuste et cruelle envers lui. Puis, par un terrible effort sur elle-même, elle retrouve sa fierté et sa dignité pour devenir une victime consentante.
Ayant la preuve de l’amour de l’empereur puisqu’il pense se suicider si elle ne consent pas à son départ, et apprenant la décision d’Antiochus de quitter Rome, Bérénice accepte son départ, pour libérer le destin des deux hommes.
Acceptant la réalité, prenant conscience du bien de l’empire, dépassant sa passion, elle sacrifie son amour par amour et se console en pensant que c’est elle qui maîtrise son destin, c’est elle qui quitte Titus et non pas Titus qui la quitte. N’abandonnant pas son orgueil, sa consolation sera de rester un modèle d’amoureuse généreuse, dans les mémoires, elle qui n’aura jamais de rivale.
Après avoir été dominée par un amour égoïste qui lui faisait contester la raison d’État, elle fait triompher la raison sur sa passion, donnant un exemple de sa vertu et de sa dignité intérieure, à l’égal des autres personnages Titus et Antiochus.
Comme voulu par l’auteur, personne ne meurt, mais respectant la règle de la tragédie, il y a bien sacrifice de l’héroïne, une héroïne qui montre toutes les caractéristiques des héroïnes raciniennes : passionnées, rongées d’incertitudes, de faiblesse, et de sentiments violents avec en plus des accents d’héroïne cornélienne confrontée aux devoirs opposés à l’amour.
L’invitée du dimanche