Abroger et remplacer

Ce n’est pas bien de se réjouir du malheur d’autrui. Cependant, quand il touche une personne haïssable, il me semble que cela autorise une forme d’indulgence. Par les temps qui galopent, les bonnes nouvelles ne sont pas si fréquentes et je considère que le camouflet infligé à Donald Trump par sa propre majorité républicaine en est une. Après avoir seriné pendant toute sa campagne que son premier « soin » serait d’abroger et remplacer la loi sur la santé instituée par son prédécesseur sous le nom d’Obamacare, il a été forcé de retirer son propre texte pour éviter l’humiliation d’un refus du Congrès.

Sa communication à ce sujet est d’ailleurs un modèle pour ses homologues français, qui se croient les rois de la mauvaise foi alors qu’ils ne sont que des apprentis, comparés au champion des vérités alternatives. Donald Trump affirme sans sourciller qu’il n’a jamais dit qu’il remplacerait et abrogerait la loi en seulement 64 jours, malgré tous les documents qui prouvent le contraire. Après cela, on s’extasie sur l’entêtement d’un Fillon à prétendre que sa femme a fourni un travail réel ! il n’y a guère que Cahuzac pour prétendre rivaliser avec lui avec son : « je n’ai pas, je n’ai jamais eu, un compte à l’étranger ». Même Super menteur Chirac n’a pas fait mieux. Quant à Pinocchio, il passerait pour un modèle de sincérité à côté du président américain. Malgré tous ses efforts pour sauver une face déjà écornée par ses revirements et ses revers judiciaires sur les mesures xénophobes des temps derniers, l’échec de sa stratégie est bien réel.

Il aura beau tenter de mettre son raté sur le compte de ses adversaires démocrates, il ne peut totalement masquer que c’est dans son propre camp, celui des Républicains, que les voix ont manqué. Le paradoxe, c’est que la fronde est le fait de l’aile la plus conservatrice du parti, qui jugeait que la réforme n’allait pas assez loin. Si je me réjouis égoïstement de voir le président orange freiné dans ses ardeurs libérales, les Américains ne peuvent malheureusement pas se féliciter de cette nouvelle, car Donald Trump dispose de pouvoirs qui lui permettront de torpiller le système de santé voulu par Obama en faveur des plus pauvres. Il lui suffira de désorganiser l’équilibre fragile entre les catégories de populations pour faire imploser le financement et mettre à mal toute solidarité entre générations. Les conséquences en seront désastreuses pour les plus démunis, mais c’est le cadet des soucis de Trump, qui veut récupérer de l’argent pour baisser les impôts des plus riches. On se demande où Fillon a trouvé son inspiration pour son programme.