Solitude
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 15 avril 2016 10:18
- Écrit par Claude Séné
L’exercice auquel François Hollande s’est soumis sur France 2 en répondant aux questions des journalistes et d’un panel de citoyens plutôt hostiles a priori pendant deux heures a dû ressembler à un grand moment de solitude. Du moins je le présume, car je n’étais pas devant mon poste de télévision hier soir pour évaluer la performance du Président. Les Français n’étaient d’ailleurs pas très nombreux à suivre l’émission, trois millions et demi de téléspectateurs, une misère pour une interview présidentielle qui draine habituellement deux ou trois fois plus de public.
Vous me direz qu’il n’est pas simple de commenter un évènement auquel on n’a pas participé. Détrompez-vous. Ce matin, je pense être dans une disposition d’esprit assez proche de celle de François Hollande, celle du chroniqueur faisant face à la feuille blanche, qu’il va falloir, vaille que vaille, remplir. Une solitude qui, comme celle du Président, fait penser à la nouvelle d’Alan Sillitoe, « la solitude du coureur de fond », un monologue où le héros décide de perdre la course qu’il pourrait facilement remporter. Ainsi, j’aurais pu, comme ces reporters de guerre qui commentent les combats depuis leur chambre d’hôtel, puiser dans les sources d’information pour donner l’illusion que j’y étais. Mieux, ou pire encore, j’aurais pu rédiger la critique avant l’intervention présidentielle, comme certains journalistes partisans ou politiques sectaires en donnent l’impression, et personne n’aurait rien trouvé à y redire.
L’essence même de la fonction présidentielle en France, c’est cet exercice solitaire du pouvoir. Les décisions importantes, c’est ce monarque républicain qui les prend en dernier ressort, pour le meilleur ou pour le pire. C’est donc justice que le peuple le rende responsable des résultats de la politique menée, même si c’est le Premier ministre qui, en théorie, détermine et conduit la politique de la nation. Et ces résultats, les Français ne croient plus qu’ils puissent changer fondamentalement au cours de la dernière année du quinquennat. Le Président aura beau clamer que la France va mieux, les chiffres de la croissance et de l’emploi renforcent le sentiment de précarité ressenti par beaucoup de nos concitoyens. Plus l’échéance se rapproche, plus il devient urgent que le président sortant annonce clairement ses intentions pour 2017 et une candidature éventuelle à sa propre réélection. Il ne va pas tarder à se trouver dans la situation de « l’angoisse du gardien de but au moment du pénalty », où il va devoir choisir un côté où plonger, sous peine de voir le ballon rentrer dans le but sans qu’il ait pu esquisser le moindre mouvement. Et cela, au détriment de son propre camp.
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