La poule aux jeux d’or

Souvenons-nous. C’était il y a quelques mois seulement. Les journaux télévisés et les magazines titraient sur les augmentations de tarifs des hôteliers à Paris et en Île de France. C’était à qui voulait exploiter la situation au-delà du raisonnable en multipliant les prix habituels par des coefficients supérieurs même au taux d’usure. On montait en épingle le comportement « responsable » de certains commerçants qui n’envisageaient pas d’aller au-dessus d’un prix représentant une simple multiplication par 5 ou 10 du tarif normal. En langage commercial, cela s’appelle « faire fois 5 ou fois 10 »

Petit à petit il a fallu se faire une raison. À ce prix-là les clients ne se sont pas bousculés pour faire des réservations, et les commerçants, à qui l’on ne peut pas reprocher d’avoir essayé de profiter d’une situation favorable, ont été contraints de réviser leurs prix à la baisse, pour essayer au moins de faire le plein. S’il est vrai que les Jeux olympiques drainent une clientèle nouvelle et spécifique, il est également démontré que d’autres touristes potentiels, peu ou pas intéressés par les compétitions sportives, auront préféré reporter leur visite de la région parisienne et seront donc absents pendant les jeux. Il en va de même pour les habitants concernés qui vont fuir leur environnement habituel, du fait des restrictions générales de circulation et les difficultés de déplacement en général. Mais ceci n’était qu’un avant-goût des problèmes à venir. Les commerçants des zones les plus sensibles, donc les plus protégées, ont eu la surprise de découvrir dernièrement des barrières empêchant les clients de rentrer dans leurs magasins. Les voilà donc au chômage technique dans des locaux déserts avec des pertes d’exploitation qui peuvent atteindre 80 à 90 % dans certains cas.

Cet état de fait, qui n’avait pas été annoncé jusque-là, a pourtant été très probablement anticipé par le ministre de l’Intérieur et les autorités chargées d’assurer la sécurité de l’évènement. Tous ces équipements ont sans doute été ajoutés pour une sécurisation maximale. J’en veux pour preuve l’existence d’un formulaire qui permettra, en théorie, d’indemniser les commerçants qui en feront la demande, moyennant un parcours du combattant habituel en pareil cas. Il faudra prouver une baisse significative de chiffre d’affaires, vous imaginez les détails. Tant et si bien que l’on finit par se demander si ces jeux, qui se voulaient les moins coûteux de l’histoire moderne, et qui ont effectivement presque tenu leur budget prévisionnel côté investissements, ne vont pas finalement être aussi ruineux que les précédents. Seule façon de ne pas passer le côté pharaonique de tous les Jeux olympiques par pertes et profits, c’est d’escompter un effet retard dans le gigantesque coup de pub que vont constituer ces évènements planétaires, dont on espère qu’ils seront réussis et contribueront au rayonnement de notre pays.