Larrons en foire

On ne peut pas dire que la visite et l’accueil cordial de Kim Jong-un en Russie de la part de Wladimir Poutine constitue une surprise. Ces deux-là sont faits pour s’entendre, car ils sont à la tête de pays qu’ils tiennent dans une main de fer, exerçant un pouvoir sans partage, n’hésitant pas à faire exécuter ceux qui manifesteraient la moindre velléité de s’opposer à leur politique autocratique. S’il fut un temps où le dictateur nord-coréen a pu être tenté par une certaine normalisation de ses relations avec le monde occidental en profitant de la mégalomanie galopante d’un Donald Trump, cette période est bel et bien révolue.

Kim Jong-un a fait l’expérience du dialogue avec une administration américaine erratique, sans qu’il en sorte grand-chose de concret, et c’est tout naturellement qu’il est retourné vers l’allié naturel que constitue la Russie de Wladimir Poutine. Les deux dirigeants ont tout à y gagner. La Corée du Nord a besoin du blé russe et espère développer sa capacité militaire spatiale grâce à la technologie de son puissant partenaire. De son côté, Poutine compte sur la capacité des Nord-Coréens à lui fournir des munitions pour poursuivre sa guerre illégale en Ukraine, et escompte même que des « volontaires » viendront renforcer des effectifs qu’il peine à recruter dans la population russe. Les deux dirigeants ne craignent pas les représailles de la communauté internationale, car ils sont déjà visés par des sanctions maximales.

Si la lune de miel entre Kim et Wladimir n’a rien de surprenant et s’ils s’entendent en effet comme cul et chemise, si vous me passez l’expression, du fait de leur communauté d’intérêts, le résultat du sommet du G20, les vingt pays les plus riches de la planète a de quoi étonner et inquiéter les partisans d’un ordre mondial régulant les relations entre les états. La déclaration finale du G20 a pour particularité de refuser de désigner la Russie comme responsable de la guerre en Ukraine et agresseur d’un peuple soi-disant frère. Le président indien, Narendra Modi, hôte de la réunion a réussi l’exploit de faire adopter un compromis a minima, qui exprime la victoire d’un camp désigné sous le terme obscur de « Sud global », qui ne veut pas nommer le président russe comme le fauteur de trouble. Ce « non-alignement » va d’ailleurs très loin. Le président brésilien, Lula da Silva, autrefois porte-parole du parti des Travailleurs, grâce auquel il est parvenu au pouvoir, m’a totalement sidéré en prenant le parti de l’autocrate russe. Il l’a invité chaleureusement au prochain sommet qui se déroulera au Brésil en lui promettant formellement l’impunité malgré le mandat international qui a été lancé contre lui et devrait l’empêcher en théorie de se rendre dans aucun pays appliquant les traités internationaux.