Je frémis en le racontant

C’est cette expression d’origine latine, « horresco referens » en VO, prononcée par le héros de l’Énéide et rapportée par Virgile, qui me parait résumer le plus fidèlement la situation à Annecy, où un homme a blessé sérieusement quatre enfants en bas-âge, ainsi que deux adultes. Je précise que pour des raisons techniques, ce billet a été rédigé le jour même de cette attaque à l’arme blanche et ne peut donc pas prendre en compte les derniers développements de l’enquête. Au moment où j’écris ces lignes, l’assaillant a été identifié, il s’agit d’un réfugié syrien qui vit depuis une dizaine d’années en Suède où il a obtenu l’asile politique et rien ne semble indiquer un caractère terroriste à ses actes horribles.

L’ensemble de la classe politique a bien évidemment fait part de son émotion et de son soutien aux victimes et à leurs familles. Le Président n’a pas jugé bon de se rendre sur place immédiatement, laissant ce soin à la Première ministre et au ministre de l’Intérieur. Il s’est contenté d’un tweet où il mentionne le caractère « lâche » de ces actes, une formule passe-partout généralement employée en cas d’attaques globales terroristes touchant des victimes indifférenciées. Dans l’état de mes connaissances, l’agresseur serait un chrétien d’orient, et il s’est attaqué spécifiquement à de très jeunes enfants. Aucun antécédent psychiatrique ou judiciaire n’est cependant connu à ce stade. Selon la formule consacrée, aucune piste n’est donc privilégiée pour le moment, une façon de dire que l’on se perd en conjectures. Ce qui n’a pas empêché Aurore Bergé, présidente du groupe Renaissance à l’Assemblée nationale, de critiquer vivement ses collègues de l’opposition, qui n’auraient, selon elle, pas respecté un délai de décence en continuant leurs travaux. Elle les a traités de chiffonniers poursuivant de vaines batailles.

Ce qui est manifestement faux, puisqu’une minute de silence a été demandée et observée dès que la nouvelle s’est répandue, et que le groupe LIOT a retiré sa proposition de loi sur l’abrogation de la réforme des retraites. On se demande parfois ce qui a pu affecter cette députée pour la rendre aussi agressive tant dans la forme que sur le fond. Quant à Éric Ciotti, patron des Républicains, il a l’air bien décidé à exploiter ce nouveau fait-divers pour durcir son projet sur l’immigration, bien que le réfugié en question soit en situation régulière. On risque d’assister à une surenchère, ou une course à l’échalote avec le Rassemblement national, et même les soutiens d’Emmanuel Macron dans leur chasse aux électeurs, quoi qu’il en coûte. Je doute que le débat en sorte grandi ni qu’il finisse par s’éteindre de lui-même, tant que la démagogie continuera à être une sorte de règle non écrite, toujours plus horripilante, mais tellement répandue.

edit: Emmanuel Macron se rendra au chevet des victimes