IVG : pourquoi faire simple ?

Les sujets susceptibles de faire consensus sont assez peu nombreux pour être soulignés. Si le droit à l’interruption volontaire de grossesse est généralement admis depuis que Simone Veil a réussi à faire voter la loi qui porte son nom en 1975, non sans mal, la mauvaise expérience d’un retour en arrière aux États-Unis fait craindre un possible retournement de situation, y compris en France. D’où l’idée de rendre ce droit constitutionnel, afin de le consolider et d’éviter de mauvaises surprises, toujours possibles. Mais le gouvernement, bien que prêt à légiférer sur tout et n’importe quoi, n’a pas souhaité se saisir de la question en présentant lui-même un texte.

Il préfère en laisser l’initiative aux députés et sénateurs, alors que les sondages démontrent que l’opinion y serait favorable. Un premier texte présenté par Europe écologie les verts a été rejeté par le Sénat en octobre dernier, et les Insoumis font une proposition de loi (d’origine parlementaire, donc) aujourd’hui même dans le cadre de ce qu’il est convenu d’appeler une « niche parlementaire », c’est-à-dire une journée de débats dans laquelle il faut faire tenir tous les sujets non traités par le gouvernement, et dieu sait s’il y en a beaucoup. Le groupe de la majorité présidentielle, Renaissance, proposera son propre texte dans des termes voisins et le Rassemblement national se prononce désormais pour l’inscription de la loi Veil dans la Constitution, en l’état, sans évolutivité ou progrès ultérieurs. Alors qu’à part quelques irréductibles sénateurs tout le monde ou presque semble d’accord sur le principe, il n’est pas certain que le projet aboutisse.

Parce que pour l’instant on ne vote que pour savoir si l’on va voter, comme au bon vieux temps. Une loi constitutionnelle ne peut être adoptée que par référendum ou par une majorité des trois cinquièmes du Parlement réuni en congrès. La voie référendaire étant toujours très risquée, le président devrait donc choisir la voie du Congrès et commencer par déposer une proposition de loi d’origine gouvernementale, ce qu’il se refuse pour l’instant à faire pour des raisons obscures au nom du débat démocratique, qui fait pourtant cruellement défaut sur bien d’autres sujets. Et voilà comment on amuse la galerie en compliquant inutilement des questions sur lesquelles on pourrait aboutir à un consensus. Le plus ennuyeux, c’est que notre système parlementaire ne laisse qu’une portion congrue aux groupes d’opposition, puisque l’exécutif a le privilège de fixer l’ordre du jour des assemblées, au point que la France Insoumise, par exemple, a fini par renoncer d’elle-même à présenter deux de ses textes concernant le rôle du président Macron dans l’implantation d’Uber en France et l’augmentation du SMIC à 1600 euros, de crainte de ne pas avoir le temps de discuter de la corrida, notamment.