L’OTAN suspend son vol

Et le monde a retenu son souffle, en apprenant qu’un missile, apparemment de fabrication russe, s’était abattu et avait explosé près de la frontière entre l’Ukraine et la Pologne, du côté polonais, causant des dégâts matériels et la mort de deux citoyens polonais. Car la Pologne fait partie de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord, destinée à porter secours et assistance à chacun de ses membres au cas il en aurait besoin pour se défendre. On pourrait imaginer, si ce missile a été tiré délibérément sur le territoire d’un pays membre de l’OTAN, qu’il joue le rôle de détonateur, comme l’attentat commis sur l’Archiduc François-Ferdinand à Sarajevo en 1914 a déclenché la 1re guerre mondiale.

En effet, la Pologne a convoqué l’ambassadeur russe à Varsovie pour lui demander des explications, et l’OTAN doit se réunir ce matin même pour évaluer la situation et prendre les décisions nécessaires. À ce stade, il ne semble pas que le missile qui a touché le sol polonais, s’il est bien de fabrication russe, ait été tiré volontairement pour provoquer une réaction des Occidentaux ou tester leur capacité de riposte. La propagande russe rejette comme d’habitude la responsabilité de l’incident sur son adversaire ukrainien, et l’hypothèse d’une déviation de trajectoire due à tir de défense antiaérienne n’est pas exclue. L’important est que les acteurs de cette situation, que l’on peut qualifier d’explosive, ont tous gardé leur sang-froid et ne se sont pas précipités dans une surenchère verbale, ou pire encore. Pour l’instant, seul l’article 4 du traité est évoqué, ce qui limite les suites éventuelles à des consultations et des décisions communes, et le recours à l’article 5, plus contraignant, n’est pas encore envisagé.

Même si l’on écarte toute intentionnalité de la part de la Russie de provoquer une extension du conflit, force est de constater que cet « accident » prend place dans un vaste programme de tirs massifs de missiles déclenché par le président russe sur l’ensemble du territoire ukrainien, avec pour objectif de détruire les infrastructures ukrainiennes afin de plonger le pays dans l’obscurité et terroriser les populations civiles. Au lendemain de l’abandon de la capitale régionale de Kherson et sa reprise triomphale par les Ukrainiens, cette nouvelle attaque ne peut être interprétée que comme une forme de vengeance de Vladimir Poutine, tentant désespérément de sauver la face avec les dernières armes à sa disposition. En ne participant pas en personne au G20 de Bali, il s’est épargné une nouvelle humiliation. Celle de se voir ignoré par la plupart des dirigeants présents, et d’être associé à une déclaration finale qui consacre le désir des pays participants d’aboutir à la fin de ce conflit. Ce n’est malheureusement encore qu’un vœu pieux, mais peut-être un premier signe que les soutiens habituels de Poutine pourraient le lâcher, à terme.