Il faut qu’une porte…
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 26 juillet 2022 11:01
- Écrit par Claude Séné
Vous connaissiez déjà la pièce de théâtre d’Alfred de Musset, « il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée », mais désormais il va falloir être plus précis avec les déclarations de la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, qui veut obliger les commerçants à laisser leur porte close quand leur magasin est climatisé. Et, après tout, cela semble être une mesure de simple bon sens afin d’éviter le gaspillage, car les petits oiseaux ne dépensent guère leurs économies dans les commerces, simplement parce qu’il y ferait plus frais l’été, et plus chaud l’hiver.
Si l’on osait, on dirait volontiers que la ministre est en train d’enfoncer des portes ouvertes, et qu’il ne devrait même pas être nécessaire de légiférer pour imposer une mesure qui permet aux intéressés de dépenser moins et serait donc à leur avantage. Selon la ministre, la clim' porte ouverte coûterait 20 % de dépenses supplémentaires et l’interdiction devrait donc être plébiscitée par les commerçants. Mais les choses ne sont jamais aussi simples qu’elles le paraissent et des mesures de cet ordre ont déjà été prises dans certaines communes, et notamment à Paris ou Lyon, au moyen d’arrêtés municipaux, et sont en vigueur depuis hier. Le projet de décret gouvernemental vise donc la généralisation de ces réglementations et l’uniformisation des sanctions, jusqu’à 750 euros d’amende, pour les récalcitrants. Car la plupart des commerçants craignent que la politique de la porte fermée ne dissuade leur clientèle de franchir le pas, et il semble que leur inquiétude soit fondée. Car cet attrait de la fraîcheur en période de forte chaleur est d’autant plus efficace qu’il est largement inconscient. On sait que dans les grandes surfaces on stimule les ventes de viennoiseries en diffusant des arômes de pain frais à proximité des rayons concernés.
Si ces nouvelles règles voient finalement le jour, il restera à les faire appliquer, et ce n’est pas nécessairement aussi facile que l’on peut l’imaginer. Car il faudra du personnel, municipal ou national, pour constater les infractions, les notifier aux commerçants, et recouvrer les créances ainsi émises. Ce qui a un coût, car ces nouvelles tâches ne pourront pas être absorbées par le personnel existant. D’autant plus que les économies demandées concerneront également les publicités lumineuses, autorisées ou interdites selon des modalités variables en fonction de la taille de l’agglomération, inférieure ou supérieure à 800 000 habitants. Bref, à partir d’une bonne intention, on risque d’aboutir, comme d’habitude, à un mille-feuille administratif dont l’efficacité reste à démontrer, pour réaliser des économies de faible amplitude, au risque de mécontenter une part non négligeable de la clientèle électorale de la république en marche, sans réussir à convaincre de la toute récente fibre écologique du gouvernement dans cette chasse aux gaspis.