Boutons de guêtre

Pour certains ministres nouvellement nommés, c’est le baptême du feu, à tous les sens du terme. Je pense en particulier à l’une de mes préférées, Amélie de Montchalin, la ministre de la Transition écologique, un poste taillé sur mesure pour diluer les responsabilités dans le domaine de l’environnement, placé sous l’autorité de la Première ministre, aussi peu compétente elle-même en la matière. Voilà qu’elle est confrontée à une vague de chaleur qui s’amorce et doit donner son avis sur l’utilisation de la climatisation. Comment répondre sans se mettre à dos la moitié des Français en pleine période électorale ?

Alors elle essaie de botter en touche en minimisant le nombre de climatiseurs en fonction, que « beaucoup de Français » ne possèderaient pas, ignorant superbement les chiffres qui indiquent un taux d’équipement de 25 %, en forte augmentation ces dernières années. D’un autre côté, elle ne prend pas grand risque en appelant à la modération, au bon sens et à la sobriété des Français concernés. Il est vrai qu’elle doit être consciente que cette question ne sera bientôt plus son problème si les électeurs de l’Essonne confirment leur vote dans la sixième circonscription où elle était devancée assez nettement par le candidat de la NUPES. Bref, avec ou sans Amélie de Montchalin, le gouvernement se doit d’être en ordre de bataille pour affronter la canicule précoce annoncée cette semaine, afin d’éviter le fiasco de 2003 quand le ministre de la Santé de l’époque, Jean-François Mattei, prenait des vacances au lieu de s’occuper de l’hécatombe en cours chez les personnes âgées.

Cette fois, il ne manquera pas un bouton de guêtre. Le dispositif est prêt depuis le 1er juin. Les urgences et les hôpitaux ne se sont jamais portés aussi bien. Le personnel est pléthorique, bien reposé après des années de sureffectifs, et le moral est au beau fixe, grâce à la revalorisation massive des rémunérations de toutes les catégories, qui en avaient grand besoin. Rassurées aussi les familles qui confient leurs parents et grands-parents aux EHPAD, dont la situation, précaire il y a peu, s’est grandement améliorée. La nationalisation des établissements à but lucratif a sûrement joué un rôle positif dans cette heureuse évolution. Un budget suffisant a permis d’embaucher un personnel qualifié et en nombre convenable, tandis que les équipements ont suivi l’évolution en garantissant une température modérée dans l’ensemble des structures d’accueil. Bon, redevenons sérieux quelques minutes. Au vu du degré de préparation du gouvernement, dont la moitié des membres sont préoccupés par leur élection en tant que députés qui ne siègeront pas, je ne saurais trop vous conseiller d’adapter votre tenue aux circonstances météorologiques. Sauf à y être obligé par des contraintes liées à votre emploi, préférez le port de sandales ou d’espadrilles à celui des guêtres, trop chaudes pour la saison, et vraiment passées de mode.