Enfin seuls !

En ce premier janvier 2021, plus de quatre ans après le référendum qui a vu la victoire du Brexit au Royaume-Uni, et malgré de nombreuses tentatives infructueuses de conciliation, le divorce avec l’Union européenne est désormais consommé, au prix d’une convention négociée jusqu’au dernier moment et même au-delà, puisque les états membres devront encore ratifier le compromis obtenu aux forceps, qui préserve l’essentiel des intérêts des uns et des autres, sans satisfaire vraiment aucun des ex-partenaires. Mais n’est-ce pas le lot commun de tous ces anciens conjoints qui ne s’accordent plus que sur un seul point, la rupture ?

Pour être franc, l’union elle-même n’avait jamais été complètement consommée. Les Britanniques n’avaient jamais intégré l’union monétaire ni adopté la monnaie unique, l’euro, préférant conserver leur indépendance sur ce point comme sur beaucoup d’autres. Ils ne faisaient pas non plus partie de l’espace Schengen, et s’ils participaient au budget européen, c’était à la condition de revoir leur argent, et si possible avec un bonus, comme le disait clairement Margaret Thatcher. Pour les Anglais, l’Europe aurait dû se limiter à un vaste espace de libre échange commercial et surtout pas tendre de quelque manière que ce soit vers la création d’une sorte de fédéralisme avec des États-Unis d’Europe. On pouvait leur reprocher de vouloir garder un pied dedans et l’autre dehors, et, à vrai dire, leur stratégie n’a pas changé dans la désunion comme dans l’union. Ils auraient accueilli avec enthousiasme une forme d’accord dans lequel ils se seraient désengagés de leurs obligations tout en continuant à bénéficier des avantages du marché unique. Le commissaire européen chargé des négociations a tenu bon, grâce au soutien des pays membres, et a imposé des contreparties, permettant un accord équilibré.

Les économistes s’accordent à reconnaître que les deux parties vont perdre à ce divorce. Les formalités douanières feront perdre du temps et donc de l’argent de part et d’autre de la Manche, mais cela aurait pu être pire en cas de non-accord. Et moralement, il va y avoir un bénéfice, pas si secondaire. Les Britanniques se sont racheté une image de puissance économique et politique totalement indépendante du continent européen. Ils risquent de la payer au prix fort avec les tentations centrifuges en Écosse et en Irlande du Nord, mais c’est leur affaire. Quant à l’Union, elle pourrait être renforcée par la disparition d’un « allié » qui bloquait toutes les tentatives d’intégration plus importante des politiques propres à chaque état. Certains projets, tels qu’une défense commune européenne, vont peut-être enfin pouvoir sortir des cartons sans s’exposer au véto anglais comme par le passé. Ce que nous allons perdre en volume, avec les millions de Britanniques en moins, nous pourrions le gagner en cohésion, à condition de faire vivre les institutions européennes en rendant toute leur place aux élus du parlement européen, trop souvent cantonné au rôle de chambre d’enregistrement. Il est temps de consommer l’union, puisque nous sommes à présent entre nous.

Commentaires  

#1 jacotte 86 01-01-2021 11:13
tout n'est pas rose pour autant...il y a encore des états "limites" sur le respect des valeurs démocratiques, mais il faudra faire avec
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