50 nuances d’étiquettes
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 21 janvier 2020 10:50
- Écrit par Claude Séné
À chaque élection nationale, sa réforme du code électoral destinée à favoriser la majorité en place. Avant tout scrutin, le premier soin du ministre de l’Intérieur chargé de l’organisation des élections est de modifier la carte des circonscriptions, notamment pour les législatives, afin d’obtenir le maximum d’élus, quitte à faire basculer des communes ou des quartiers d’un député à un autre. Un « charcutage » électoral qui permet d’amplifier un mouvement ou de limiter les dégâts. À l’occasion des municipales, qui s’annoncent mal pour le pouvoir actuel, Christophe Castaner a lui aussi sorti sa calculette.
Le parti du président souffre d’un manque d’implantation locale tellement criant qu’il lui est impossible de présenter des candidats dans la plupart des zones rurales. Le ferait-il que ses listes auraient très peu de chances d’être élues, spécialement après tous les conflits sociaux qui ont démontré sa déconnexion des réalités du terrain. Il va donc se concentrer sur les villes d’une certaine importance, pour deux raisons. La première c’est qu’une victoire dans une métropole régionale, ou encore mieux, dans la capitale, éclipserait la masse de ses échecs probables ailleurs. C’est pourquoi, en plus de ses candidats propres, estampillés République en marche, Modem ou UDI, la majorité présidentielle soutiendra certains sortants, jugés Macron-compatibles. La deuxième raison, c’est que les candidats potentiels, ministres en tête, ne veulent pas céder leur droit d’aînesse pour un plat de lentilles et que les indemnités et le prestige des petites communes seraient insuffisants pour compenser l’abandon de leurs prébendes et sinécures actuelles.
Les scrutins s’annoncent cependant compliqués, en particulier à Paris. Il fallait donc trouver le moyen de masquer la défaite annoncée, ce à quoi s’emploie la circulaire dite Castaner concernant l’interprétation des résultats par les préfets. Outre les « étiquettes » politiques revendiquées par les participants eux-mêmes, les préfets avaient le privilège de pouvoir attribuer une nuance politique aux candidats sans étiquette en les classant en divers droite, divers gauche ou divers centre sur la base de leur appréciation personnelle. Cette mesure ne s’appliquait pas aux petites communes où les listes sont le plus souvent dénuées d’appartenance politique nationale. La circulaire étend ce no man’s land à toutes les communes de moins de 9 000 habitants, soit 96 % du territoire, ce qui rendra impossible toute comparaison avec des élections antérieures. Selon la méthode qui a fait ses preuves, le gouvernement préfère casser le thermomètre plutôt que de faire baisser la fièvre. Malgré tous les tripatouillages possibles et imaginables, y compris la création artificielle d’une étiquette LDVC (liste Divers Centre) regroupant tous ceux que la majorité soutiendra, les partis traditionnels vont probablement tirer leur épingle du jeu, et les écologistes pourraient faire une percée historique.
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