La retraite à somme nulle

On parle de jeu à somme nulle lorsque le total des gains et des pertes des joueurs est égal à zéro. C’est-à-dire quand les gagnants reçoivent exactement ce que les perdants abandonnent. L’exemple le plus simple est celui du jeu de poker : chaque joueur dispose au départ d’une somme identique, et à la fin du jeu certains ont gagné, d’autres ont perdu, mais le total n’a pas changé. Les partenaires sociaux, comme on dit, bien qu’ils se comportent le plus souvent comme des adversaires, semblent avoir pris conscience récemment que le régime des retraites faisait l’objet d’un jeu à somme nulle.

En effet, la France est soumise à un régime dit par répartition, c’est-à-dire que les cotisations payées aujourd’hui servent à financer la pension actuelle des retraités, contrairement à un régime dit par capitalisation où les pensions seraient le résultat d’une épargne de ces mêmes retraités tout au long de leur carrière. Par conséquent, pour que le nouveau système « à points » fonctionne, si l’on veut faire gagner certaines catégories, comme le prétend le gouvernement, il faudra bien que d’autres, supposés privilégiés, abandonnent un certain nombre d’avantages, que l’on baptisera privilèges pour faire passer la pilule. Et ce sont certains de ces perdants qui sont en train de se manifester sous la bannière de SOS retraites, un collectif qui rassemble des professions libérales : avocats, médecins, pilotes de ligne, etc. qui seront touchés de plein fouet par le projet de réforme.

Le gros problème du gouvernement, c’est que ces professions ne sont pas une exception, qu’il suffirait de désigner à l’opprobre et la vindicte populaire sous couleur d’égoïsme et de manque de civisme et de solidarité. Les grèves dans les transports, largement suivies, sont là pour en témoigner. Les avantages consentis au fil des années par les gouvernements successifs sur des régimes spécifiques de retraites ne faisaient que compenser des rémunérations trop faibles et des conditions de travail souvent pénibles, voire inacceptables. L’état a-t-il les moyens, et surtout la volonté, de contrebalancer la perte d’une pension convenable par l’obtention d’un statut plus décent pendant la période d’activité ? En d’autres termes, est-il prêt à « mettre au pot » pour poursuivre la comparaison avec le jeu, afin de rendre acceptables ses propositions de réforme des retraites ? La principale et peut-être unique justification de cette modification serait une meilleure équité entre les citoyens. Belle idée ! mais ne faudrait-il pas commencer par le commencement, c’est-à-dire réduire les inégalités criantes dans notre société, dès la vie active ? Car les injustices les plus flagrantes dans les régimes de pension ne sont que la conséquence des différences de revenu entre les citoyens, le résultat de cette machine à exclure qui laisse tant de gens sur le bord du chemin dès leur plus jeune âge.

Commentaires  

#1 jacotte 86 16-09-2019 11:22
bon dieu mais c'est bien sur... commençons par là sinon c'est le mur!!!
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