De quel Grenelle je me chauffe
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 8 juillet 2019 10:29
- Écrit par Claude Séné
Nous avions connu avec Sarkozy la période « un fait divers, une loi », destinée à faire croire aux Français que le gouvernement ne restait pas inactif et qu’il était toujours prêt à dégainer son arsenal législatif pour résoudre les problèmes qu’il avait été incapable d’empêcher de survenir. Et quand la loi était votée et que la situation ne s’était pas améliorée, il suffisait d’en proposer une autre, en espérant que de l’empilement législatif surgirait la lumière. Mais ça, c’était l’Ancien Monde, avant que n’advienne le règne du « en même temps » et du ni gauche ni gauche.
Pourquoi voir petit quand on peut faire dans l’immense ? Désormais nous sommes passés sous la jurisprudence « un problème, un Grenelle ». Après un « grand débat » qui a permis d’occuper le terrain après la débâcle des multiples concessions soi-disant octroyées aux gilets jaunes, alors que l’on traitait leurs principales revendications par le mépris, on nous promet un Grenelle des violences conjugales pour la rentrée prochaine. Car il est urgent d’attendre. On ne compte guère que 74 victimes depuis le début de l’année, ce qui nous amènera une douzaine de crimes supplémentaires d’ici le mois de septembre si les conjoints et ex-conjoints continuent au même rythme. Comme si l’on découvrait brusquement ce scandale absolu, et qu’il faille une réflexion longue et approfondie pour prendre les mesures qui s’imposent. On peut d’ores et déjà annoncer les pistes qui sortiront de la grand-messe de septembre : le port d’un bracelet électronique pour les hommes violents, la multiplication des téléphones « grave danger », la généralisation d’ordonnances de protection des femmes menacées, etc. Mais la base de tout se trouve dans les commissariats, et tout le monde le sait. Quand un prof a le culot de protester contre un projet de réforme, son ministre le menace de toutes les sanctions possibles, mais si un policier refuse d’enregistrer une plainte de femme victime de violences conjugales, il encourt au pire une remontrance, voire un blâme.
Emmanuel Macron s’est fendu d’un message sur Facebook pour rendre hommage aux victimes et pour exhorter les femmes à utiliser les solutions qui, selon lui, existent déjà. Une manière détournée de renverser les responsabilités. On pourrait croire à sa bonne foi, s’il n’avait déjà tenu le même discours en novembre 2017, sans qu’il soit suivi d’effet visible. Tant que les policiers ne seront pas formés à entendre les plaintes, tant qu’ils ne seront pas contraints de les enregistrer quand les femmes ont le courage de les formuler, tant que l’état ne leur donnera pas les moyens de protéger les victimes potentielles et d’empêcher les hommes violents de nuire, il ne faut pas s’attendre à des résultats significatifs. Et ce n’est pas en empilant les réunions destinées à se donner bonne conscience que l’on fera avancer ce dossier, comme tant d’autres.
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