Benalla est-il un gros mytho ?
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 7 février 2019 10:30
- Écrit par Claude Séné
C’est apparemment la conclusion à laquelle est parvenu le sénateur de droite de la Manche, Philippe Bas, en réaction aux enregistrements publiés par Mediapart sur la conversation entre Alexandre Benalla et son ami Vincent Crase. Selon lui, il s’agirait de fanfaronnades quand l’ancien chargé de mission se prévaut du soutien du « patron », entendez le président de la République. Je sais bien qu’un sénateur ne va pas, par définition, à un train d’enfer, mais cette réaction me paraît tout de même très modérée.
Après tout, Philippe Bas préside toujours la commission sénatoriale qui a auditionné sous serment Alexandre Benalla, et ces enregistrements contredisent formellement les déclarations reçues par la commission d’enquête, ce qui constitue purement et simplement un parjure. Philippe Bas ne me semble pas naïf au point d’avoir cru sur parole tout ce que déclarait Alexandre Benalla, et surtout tout ce qu’il ne disait pas. De là à ne manifester aucune surprise, sans parler d’indignation, à la révélation par l’intéressé lui-même de ses turpitudes, il y a quand même un gouffre. Pourquoi tant de placidité ? Mystère. Le contenu des conversations, outre qu’il indique une grande impression d’immunité, voire d’impunité, montre l’existence d’un réseau parallèle en lien avec un oligarque russe proche de Poutine, ce qui est quand même fort inquiétant.
On a cru, et moi le premier que la demande de perquisition de Mediapart pour faire main basse sur les originaux des enregistrements faisait suite à une plainte qui aurait été déposée par Alexandre Benalla, pour violation de la vie privée. Le motif est le bon, excepté que la demande ne vient pas de l’intéressé, mais de Matignon. Quand la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, affirme qu’elle n’a pas donné d’instructions spécifiques au parquet sur cette affaire, elle ne ment peut-être pas formellement, bien que ce soit difficile à prouver. Par contre, une lettre du directeur de cabinet d’Édouard Philippe a bien été adressée officiellement au procureur de la République. L’exécutif semble avoir des doutes sur la confidentialité des services, notamment celui du Groupe de sécurité du Premier ministre, ce qui serait la vraie raison de cette demande de perquisition.
Mediapart, comme la loi l’y autorise, a refusé la perquisition de ses locaux au nom de la protection des sources, mais a accepté de remettre ses enregistrements à la justice, qui devrait à présent faire son travail en toute indépendance. Si, si, on y croit. D’ailleurs, on n’a pas le choix. Si l’on en croit la Garde des Sceaux, nous ne sommes pas à Caracas. Peut-être, même si l’on ne voit pas bien ce que le Venezuela vient faire là-dedans, mais il n’y a pas si longtemps, Nadine Morano était bien ministre de Sarkozy et elle aimerait supprimer le secret des sources, ce privilège des médias dont elle ne voit pas la nécessité.