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Achille et la tortue
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 29 janvier 2019 10:41
- Écrit par Claude Séné
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Le Premier ministre, qui était à peu près le seul au gouvernement à défendre l’abaissement de la vitesse à 80 km/h sur le réseau secondaire, s’est félicité bruyamment des statistiques selon lesquelles la mortalité sur les routes serait en baisse et retrouverait un niveau comparable à celui de 2013, quand la vitesse était encore limitée à 90 km/h. Chacun ne pourra que se réjouir des vies épargnées, toutefois il reste à analyser finement le lien de causalité entre la vitesse et l’accidentologie, quand on sait par ailleurs que les comportements au volant, ou même la météo jouent aussi un rôle important.
Admettons qu’il y a une influence directe de la vitesse sur l’accidentologie. La baisse ne devrait donc pas se limiter aux seuls 10 km/h, il faudrait passer à 70, puis 60 ou même 50 km/h, jusqu’à l’étape ultime, où la voiture restera au garage, entraînant donc zéro accident. Cette logique me rappelle la fameuse aporie décrite par le philosophe grec, Zénon d’Élée. Zénon imagine qu’Achille, qui a laissé une certaine avance à la tortue, ne pourra jamais combler totalement son retard. En effet, pendant qu’il parcourt la distance qui le sépare du point de départ de la tortue, celle-ci avance un peu elle aussi, et ainsi de suite. Si bien qu’il restera toujours un écart entre les deux, bien que de plus en plus infime. On peut aussi supposer que l’abaissement de la vitesse trouvera ses limites, et que l’objectif de zéro accident restera un but inatteignable.
Ce qui a provoqué la colère dans les campagnes, ce n’est pas tant la vitesse en elle-même que le sentiment d’être une nouvelle fois, après les hausses du prix des carburants, taxés. Ce n’est pas un hasard si 60 % des radars ont été endommagés en fin d’année. Quand on sait qu’ils sont supposés rapporter 1 milliard d’euros en année pleine, on mesure le degré d’hypocrisie des autorités qui ne peuvent que souhaiter prendre les automobilistes en défaut, au lieu de leur faire respecter la limitation. C’est un peu comme la taxation de l’alcool et du tabac, qui se veut dissuasive, mais pas trop, sous peine de faire perdre à l’état ses recettes de poche, non négligeables. Si le consentement à l’impôt peut être raisonné quand il touche au revenu, même si chacun peut contester sa situation personnelle, comparée à celle du voisin, le principe même de ces prélèvements sur l’usage de son véhicule, largement contraint, ne peut qu’exaspérer les frustrations, au-delà de toute logique.