Divorce à l’anglaise

Entre l’Angleterre et l’Europe, ce n’était pas un mariage d’amour, mais plutôt un mariage « arrangé », un mariage de raison, dans lequel la famille de la mariée, et notamment la mère Thatcher, n’a eu de cesse que de récupérer au plus vite sa dot et de se faire rembourser les frais de la cérémonie. La fiancée anglaise n’a jamais renoncé complètement non plus au flirt avec son ancien prétendant américain pour qui elle a toujours gardé les yeux de Chimène, même s’il n’existe pas de preuve formelle de son infidélité.

C’est donc à un divorce par consentement mutuel que nous devrions assister à la suite de la lettre officielle de rupture signée hier par la Première ministre Theresa May, après 44 ans de vie commune. On se souvient que les fiançailles avaient été annulées par deux fois du fait du véto du Général de Gaulle en 1962 et 1967 avant que le mariage officiel soit célébré le 1er janvier 1973. De Gaulle trouvait en effet que le contrat de mariage faisait la part trop belle à l’exception britannique et il ne faisait guère confiance à l’honnêteté de la future mariée. Les négociations sur les conditions du divorce risquent de prendre autant de temps qu’il en a fallu pour préparer les noces, soit 12 ans. Car les ex-époux, comme dans la chanson de Brassens, ne sont d’accord que sur un seul point, la rupture.

Pour le reste, fidèle à son attitude de toujours, l’Angleterre réclame le beurre et l’argent du beurre : cesser de payer pour l’éducation des enfants, tout en continuant de se faire appeler Madame UE. En d’autres termes, conserver les avantages du marché unique et du statut privilégié de place bancaire et boursière intégrée, sans contribuer au budget commun. Mais avant de prononcer officiellement le divorce, il va falloir rédiger une convention fixant les droits et les obligations des deux parties. Le Royaume-Uni ne doit pas s’attendre au traitement de faveur de la poupée Barbie divorcée, qui est fournie avec la maison de Ken, la voiture de Ken, la caravane de Ken et une confortable pension alimentaire. Au contraire, l’Union européenne, qui va subir un préjudice du fait de cette séparation, va certainement demander une prestation compensatoire et présenter la note concernant les engagements en cours. Une addition qui pourrait se révéler assez salée puisqu’il est question de dizaines de milliards d’euros. De quoi être tenté de déménager à la cloche de bois, une autre expression pour désigner une attitude attribuée aux Britanniques, qui serait de filer « à l’anglaise », en toute discrétion.