Qui paye ses dettes s’enrichit-il vraiment ?

Oui, si l’on en croit le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, qui se prend visiblement pour Beethoven, la place de Mozart étant déjà occupée par le président en personne. Il faut dire que la réalité budgétaire a largement dépassé la fiction qu’on avait vendue aux Français avec un dérapage du déficit public assez impressionnant, surtout pour des Béotiens de mon acabit. En pourcentage d’abord, passer de 4,4 % à 5,1 % alors que l’objectif de 3 % en 2027 est maintenu, ça fait déjà désordre. En volume également, une dette de plus de 3000 milliards semble une montagne difficile, sinon impossible, à escalader en peu de temps.

Là où le dicton populaire parait incontournable, c’est de constater, comme le dit si joliment ma banque, qu’« un crédit nous engage, et que nous devrons le rembourser », « intérêts et principal » et cela avant l’août, disait ma commère la fourmi. C’est donc une des premières dépenses de l’état que la charge de la dette, qui s’établira à 55 milliards en 2024. Sans cette charge héritée des gouvernements précédents et depuis fort longtemps, mais largement creusée depuis l’avènement du macronisme, le budget serait évidemment plus facile à équilibrer. Selon l’opposition de droite, la France serait en quasi-faillite, comme au bon vieux temps où François Fillon misait sur la rigueur pour se poser en sauveur de la France avant d’exploser en vol avec son Pénélopegate. À l’appui de cette thèse, Bruno Retailleau affirme que nous faisons pire que la Grèce et l’Italie, considérés comme les mauvais élèves de l’Europe avec une dette atteignant respectivement 165 % et 140 % du PIB. Rappelons que le Japon serait le champion toutes catégories avec une dette de 266 % du PIB, alors que son économie est florissante.

C’est l’économiste Éric Heyer qui distingue la « bonne dette », comme dans les ménages, celle qui permet d’investir sur l’avenir et de répartir dans le temps des dépenses indispensables qui se révèleront payantes à moyen ou long terme, et « la mauvaise dette », quand on vit à crédit pour boucler les fins de mois et à des taux prohibitifs. Ce que la Cour des comptes épingle dans les dépenses publiques, ce sont souvent des dépenses de la deuxième catégorie. Quand la France a instauré le « quoi qu’il en coûte », elle a permis d’éviter des faillites, ce qui était positif, mais elle a laissé certaines entreprises profiter d’un effet d’aubaine, qui continue à grever le budget de l’état sans nécessité absolue. Alors, s’il faut réaliser des économies, il y a au moins une dépense que l’on pourrait éviter, c’est celle du port de l’uniforme à l’école, dont la pertinence n’est pas démontrée et qui coûterait quand même environ 200 euros par élève et par an, multipliés par 10 millions d’enfants, soit 2 milliards pour une mesure purement symbolique.