Surtout pas de vagues

Quand on est dans la misère, pour rester poli, jusqu’au cou, il ne faut surtout pas faire de vagues et au besoin fermer la bouche pour ne pas risquer d’avaler n’importe quoi. Il ne reste plus que quelques semaines à tenir pour le président et son gouvernement avant le deuxième tour des élections présidentielles. Ce serait quand même trop bête d’avoir résisté jusque là contre vents et marées dans un quinquennat marqué par des crises successives et finir par être rattrapé in extremis par des aléas, imprévisibles par définition. Le maître mot du pouvoir depuis qu’Emmanuel Macron est entré officiellement en campagne, c’est l’humilité, déclinée à toutes les sauces.

Les sondages sont tellement bons que ça en devient indécent. Arrivés aussi haut, ils ne pourront plus que baisser, mais quand même. Le risque c’est que les électeurs pensent que c’est plié, et qu’il est inutile de se déplacer, à part une minorité de convaincus. Il faudra sans doute dramatiser un peu au dernier moment pour faire bon poids, mais c’est du classique. Ensuite, il est nécessaire de déminer le terrain de tous les sujets qui fâchent. Un peu de calinothérapie ne peut pas faire de mal. Les Français vont pouvoir abandonner le masque, bien que les objectifs de santé publique vis-à-vis du Covid ne sont pas atteints. Non seulement les contaminations sont reparties à la hausse en France et dans plusieurs pays d’Europe, mais le chiffre des hospitalisations fixé à l’origine à 1500 cas journaliers est toujours proche de 2000. Si ça se trouve, il faudra revenir à des mesures plus restrictives, mais on s’en fout si les élections sont passées.

Un deuxième front concerne la vie chère, et surtout le prix de l’énergie. Le gouvernement mettra donc la main au portefeuille et dépensera 2 milliards pour faire une « remise » sur les carburants. Pas une baisse des taxes, quasiment invisible pour le particulier qui fait son plein et qui verra les quelques euros économisés disparaître au gré des cours du baril, mais bien une ristourne, facilement identifiable, à mettre au crédit du président sortant, et qui interviendra juste à temps, à partir du 1er avril et pour 4 mois. On espère qu’Emmanuel Macron n’aura pas affaire à des ingrats le 10 et le 24 avril prochain.

Tout semble donc sous contrôle, et même la guerre en Ukraine joue en faveur des dirigeants en place. Et pourtant, on n’est jamais à l’abri d’un grain de sable, et certaines élections dans le passé se sont jouées sur des impondérables. La situation insurrectionnelle en Corse pourrait jouer un rôle dans un sens ou dans l’autre si elle devait se prolonger. Les manifestations organisées dans l’île ont rapidement dégénéré et sont le signe d’une opposition et d’une violence qui dépassent aussi bien les autorités locales que nationales, et peut entraîner un tsunami électoral.